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actifs. Il ne la distribuait qu’avec d’infinies précautions. L’initiation comprenait sept degrés (et plus tard neuf). Le maître excitait la curiosité des novices, en leur proposant des problèmes dont ils ne devaient recevoir la solution qu’après qu’ils se seraient engagé au secret par de terribles serments. Ce pacte signé, ils appartenaient corps et âme à la secte ; ils versaient un tribut d’argent entre les mains de l’Imâm, et malheur à celui qui tentait de se soustraire aux ordres des supérieurs !

Pour l’exécution de ce plan et la création de cette maçonnerie, comme nous dirions aujourd’hui, Abdallah reçut du riche Zaïdan la somme énorme de deux millions de pièces d’or. Obligé de quitter la Susiane, il s’établit en Syrie, à peu de distance de Hamah, et de là il répandit en tout sens ses missionnaires qui firent des merveilles. Une multitude d’imaginations s’allumèrent. Il parvint à former une vaste société secrète, se disant ismaélienne et chiite, qui n’avait en réalité d’autre but que la ruine de l’islamisme officiel et de la dynastie abasside. Ses fils et petits-fils marchèrent dans la même voie. Ils fondèrent la dynastie des Fatimites, qui régna d’abord en Tunisie, puis en Égypte.


L’INITIATION DE HASAN SABAH

Cet exposé forcément est trop bref ; cependant il nous rend intelligible le premier émoi, l’ardente adhésion de Hasan, quand il rencontre ces missionnaires du grand secret, ces apôtres de la rébellion sociale et de la fusion de toutes les religions, ces chefs d’une immense conspiration permanente. Pour cette nature passionnée et désemparée, quel événement ! c’est la rencontre d’un homme à la mer avec une embarcation qui va le recueillir et où il commandera. Et tout de suite, le plus haut de ces missionnaires, Abd-Almélic Attâch, qui a distingué le génie d’une telle recrue, l’envoie au cœur de l’Ismaélisme, au point de la plus profonde initiation… « Hasan, il te faut aller dans la capitale de l’Égypte. »

L’Égypte était le pays de réussite des Ismaéliens. Ils y avaient mis sur le trône, nous venons de le dire, les descendants de leur fondateur, les petits-fils de l’occultiste persan Abdallah. Ces Fatimites (ainsi nommés parce qu’ils prétendaient, du fait d’Abdallah, descendre d’Ali et de Fatmah) avaient montré