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rejette toute modification au statut des pays rhénans ; il faudra que les fonctionnaires expulsés rentrent chez eux et soient indemnisés. Le ministre veut, on le comprend, encourager la résistance, galvaniser les énergies. Il reste des allusions, vagues et réticentes, à un programme de réparations. L’essentiel est de se camper dans l’attitude de celui qui pose des conditions, car celui qui pose des conditions est le vainqueur. — Le discours de M. Stresemann était attendu avec curiosité, car le chef du parti populiste (Volkspartei) pourrait être prochainement le successeur de M. Cuno. Il a, dit la Gazette de Voss, « limé les aspérités du discours prononcé par le ministre des Affaires étrangères sans faire de mal au ministre ; » discours habile dont l’intransigeance foncière se voile sous des dehors accommodants et qui cherche à plaire à la droite sans choquer la gauche. L’ensemble dénote plutôt une tendance à la conciliation et à la paix. « L’Allemagne souhaite un accord, écrit le Berliner Tageblatt du 18 ; cela a été souligné hier à plusieurs reprises, et précisément par le représentant de ces milieux qui sont les premiers en cause, puisque ce sont les producteurs disposant de puissants moyens de paiement. » M. Stresemann s’était montré plus accommodant que M. de Rosenberg ; M. Breitscheid, chef du parti social-démocrate, devait faire un pas de plus que M. Stresemann. II a demandé, avec beaucoup de netteté, l’ouverture de négociations par des offres formelles, le recours à un emprunt dont la majeure partie serait affectée aux réparations, l’entente avec la France par la démilitarisation du Rhin et de la Westphalie. Quand on lit les discours de MM. Stresemann, Hermann Muller et Breitscheid, on a le sentiment très net que le jour approche où il faudra choisir entre la politique de résistance, c’est-à-dire la course à l’abîme, et la négociation pour un accord, seul moyen d’éviter une catastrophe. « On a l’impression écrit le Vorwaerts, que le Gouvernement aurait derrière lui tout le Reichstag, à l’exception des nationalistes et des communistes, s’il se décidait à présenter des propositions claires pour la solution du problème des réparations. » Mais ces propositions, M. Cuno et M. de Rosenberg sont-ils qualifiés pour les apporter ? M. Stresemann et M. Breitscheid paraîtraient moins gauches dans ce rôle ingrat.

Deux courants d’opinion se sont dessinés en Allemagne dès l’occupation de la Ruhr. Les uns veulent -pousser jusqu’à ses dernières limites la « résistance passive, » au besoin jusqu’à obliger les troupes d’occupation à quelque effusion de sang, jusqu’à laisser l’eau envahir les puits de mine et les industries s’arrêter ; ils espèrent nuire