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lui aussi, les affaires du monde, mais à sa manière qui, je suppose, doit être financière et économique. Il avait besoin de repos. Je l’ai accompagné à la montagne. Ma mère est restée à Paris avec mon frère qui est à Saint-Cyr et ma sœur cadette qui prépare son baccalauréat. Maintenant êtes-vous renseigné ?

— Je m’excuse, mademoiselle, de mon indiscrétion.

— Ne vous excusez pas, reprit-elle un peu nerveuse, on rencontre ici un monde si mêlé. Quelles passions se cachent sous tous ces masques ?

— Mademoiselle, prenez garde. Vos yeux voient trop clair. Ce n’est pas l’affaire des jeunes filles.

— Oh ! les jeunes filles, aujourd’hui, vont droit leur chemin, même si ce n’est pas le droit chemin.

— Vraiment ?

— Oui, vraiment. Elles brisent tous les obstacles. Elles sont sans pitié.

De nouveau elle fixait l’attention de tout le groupe, sauf celle de miss Maud enfermée dans une discussion, sans doute sportive, avec son danseur de la veille, ce monsieur élégant, distingué, aux cheveux gris qu’Aynaud-Marnière enviait et surveillait avec hostilité. Elle s’en rendit compte et tourna en plaisanterie son réquisitoire.

— Savez-vous quelle est la dernière mode inaugurée à Paris ?

— Dites, dites, réclamèrent la Russe, la Hollandaise et les deux Américaines, à l’affût des pires extravagances.

— Vous savez que les jeunes filles donnent aujourd’hui des matinées et des soirées.

— Sans doute.

— Eh bien ! celles qui sont à la page font suivre leurs invitations imprimées de ces quatre lettres énigmatiques : P. D. B. I.

— P. D. B. I. ? Traduisez, nous vous en prions.

— Je traduis : Pas de bouches inutiles. Les bouches inutiles, ce sont les parents. On leur refuse jusqu’au buffet.

— Où commencent les parents ? demanda le partenaire de miss Maud avec un sourire pointu.

— Les parents, opina le général, ce sont tous ceux qui ne dansent pas. Je danse.

On approuva cette définition. Mais on l’étendit au patin, au bobsleigh, au ski. Tout homme qui faisait du sport, fût-ce la