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À L’EXPOSITION DU LIVRE

Ce fut une exposition charmante : je l’écris avec le regret qu’elle ait été si brève. Rarement le musée des Arts décoratifs nous en offrit une plus aimable. Je n’ai pas vu la Foire du Livre, qui se tint à Florence, l’été dernier, avec toutes les richesses des bibliothèques italiennes et le trésor des églises : je ne crois pas qu’elle pût valoir beaucoup mieux que celle-ci. Le succès a été très vif. La foule se pressait aux vitrines. Le hall baigné de clarté blonde par ses voûtes ajourées ressemblait à un grand parterre, à un champ printanier qui luttait de grâce et d’éclat avec les plates-bandes du Carrousel, où un pays ami, qui a le secret des belles fleurs, avait semé à profusion ses tulipes de jade et d’onyx et les plus chimériques de ses jacinthes jaspées. Le cadre était digne de l’objet. On s’étonnait un peu que des livres excitassent dans le public tant d’intérêt et tant d’amour. On ne se fut pas attendu à un succès si populaire. Il y avait là, ce semble, quelque chose de nouveau : comme si, dans les temps inquiets que nous traversons, on était saisi de respect pour ce que représente cet extrait ou cet abrégé de culture, ce véhicule surprenant d’émotions et d’idées, cette merveille, ce chef-d’œuvre de l’artifice humain, que l’on appelle un Livre.

C’est à l’occasion du Congrès des bibliophiles qu’est née la pensée de cette exposition. L’érudit qui connaît le mieux l’histoire des livres, M. Amédée Boinet, disciple du savant M. Henry Omont, avait pris soin de rassembler les éléments de cette histoire. Les trois bibliothèques de Paris, la Mazarine, l’Arsenal et Sainte-Geneviève, avaient reçu d’un ministre éclairé la permission exceptionnelle de se dessaisir pour quelques jours de leurs plus fameux trésors, auxquels étaient venus se joindre les pièces inestimables que conservent plusieurs bibliothèques