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une déclaration en entier écrite sous mes yeux par Mgr Zurla et scellée de son sceau.

Pendant ce temps, Madame ayant obtenu de M. le comte de Senfft des passeports pour gagner les États de l’Empereur, s’était mise en chemin à petites journées. Elle atteignit ainsi Padoue. Le gouverneur de Venise lui fit alors savoir que, d’après les ordres écrits de la main de l’Empereur le 28 août, il ne pouvait délivrer à Son Altesse Royale la permission de dépasser Udine ou Trieste. Revenant de Rome avec le papier du cardinal Zurla, je joignis à ce moment Mme la Duchesse de Berry. Elle s’élevait fortement contre l’interdiction de poursuivre sa route. Je fis observer à Son Altesse Royale que les ordres de l’Empereur dont M. de La Ferronnays et moi lui avions déjà fait part ne pouvaient être rétractés que lorsque le Roi, ayant reçu mes rapports de Florence, aurait réclamé ce changement à Sa Majesté Impériale. Or mes dépêches ne devaient être arrivées à Charles X que ce jour-là même. En outre, l’Empereur et le prince de Metternich n’étant pas encore de retour à Vienne, cela amènerait peut-être quelque lenteur dans les modifications désirées. Le meilleur parti était d’attendre.

Ces raisons ne purent convaincre Madame. Elle se disait persuadée qu’on avait de nouveau enjoint l’arrêt de sa marche. Elle crut alors devoir me retirer la déclaration du cardinal Zurla. J’aurais pu me refuser à la lui remettre, mais les intentions du Roi étaient trop sages pour que je laissasse à qui que ce soit le plus léger prétexte d’en méconnaître la loyauté. Je donnai donc la déclaration à Son Altesse Royale, en ne lui dissimulant pas combien elle me paraissait agir contre ses intérêts. Toutefois, elle s’engagea de nouveau avec moi à communiquer au Roi cet acte qui doit être entre les mains de Sa Majesté comme un titre moral de la situation actuelle de Madame. Quoi qu’il en soit, Sa Majesté a décidé fort sagement quand elle a résolu de voir la Duchesse de Berry et de lui donner rendez-vous à Leoben.

La seconde condition acceptée par Madame est encore bien plus essentielle à remplir que la première, car seule elle peut mettre Son Altesse Royale, ses enfants et sa famille à l’abri d’un danger imminent qui aurait les plus pénibles et les plus fâcheuses conséquences. Je vise la question de la tutelle. D’après les dispositions de la loi Briqueville, les biens appartenant aux enfants