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quelques mots en abréviations hâtives. Avant de quitter Florence, il fait établir par le comte de Senfft, ambassadeur d’Autriche, des passeports pour la Duchesse de Berry, permettant à la princesse de se diriger vers l’Autriche. Aussitôt sa mission à Rome accomplie, le comte de Montbel devra rejoindre Madame. C’est le 15 septembre à minuit qu’il arrive à Rome. Dès le lendemain, il se rend chez le cardinal Zurla qui lui remet une copie authentique de l’acte de mariage de la Duchesse de Berry et du comte Lucchesi-Palli. Il repart le jour même, à cinq heures, et rejoint la Duchesse de Berry à Padoue. Là, se produit un pénible incident qui détruit toute la combinaison si laborieusement agencée. Revenant sur ses décisions, la princesse exige que le comte de Montbel lui remette l’attestation du mariage, attestation qu’il s’était fait délivrer à la vicairerie d’État de Rome. Le comte de Montbel exprime à Madame sa douloureuse surprise de la voir ainsi méconnaître les conventions établies. Sa mission ayant donc échoué, le comte de Montbel se dirige sur Vienne où il arrive le 25 septembre. Dans l’entre-temps la famille royale avait décidé de partir à la rencontre de la Duchesse de Berry. A cet effet, la Duchesse d’Angoulême et Mademoiselle gagnent Leoben où devaient les rejoindre Charles X, le Duc d’Angoulême et le Duc de Bordeaux ; le comte de Montbel, comme nous allons le voir, allait également s’y rendre. Voici la continuation de son Journal. .


Leoben, 2 octobre.

Après avoir pris les lettres du prince de Metternich, chez lequel j’ai diné avec la famille Zichy et la comtesse Lanckoronska, je suis parti de Viennes sept heures du soir pour Leoben où devait se rendre la famille royale. Un temps admirable favorisa ma route et j’arrivai à destination hier 1er octobre. Devant la porte d’une auberge, deux voitures de voyage attirèrent mon attention. Je pénétrai dans la modeste demeure et j’y trouvai Mme la Dauphine. Elle m’avait devancé quelque peu. Je remarquai aussitôt en elle une vive anxiété causée par les cris des Français qui sont venus à Prague pour le 29 septembre, date où ils avaient à cœur de proclamer par une manifestation éclatante la majorité et les droits du Duc de Bordeaux. L’émotion de la princesse était entretenue par les exagérations de Mme de Gontaut. Celle-ci veut se figurer que l’Empereur a chassé de Bohême la famille royale. Elle jette donc l’anathème contre l’Autriche, contre ce départ subit dont personne ne l’avait prévenue. Elle se lamente sur le peu de confiance qu’on lui témoigne. Son mécontentement est excusable. En effet, elle a