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Madame. Je ne me prêterai nullement à attendre auprès d’elle Chateaubriand qui doit venir la joindre, car il est impossible de s’accorder avec cet homme fou de vanité et sans bonne foi. La Duchesse de Berry, continua La Ferronnays, m’en voulait beaucoup d’avoir blâmé ses projets d’expédition et d’avoir écrit une lettre à Saint-Priest où, en démontrant les dangers et l’inopportunité d’une telle entreprise, je disais cette phrase prophétique : « Vous conduirez cette princesse à la destruction de sa cause et peut-être à sa confusion. »

Nous voyons justement M. de Saint-Priest qui nous parle du 29 septembre. M. de la Ferronnays lui raconte alors ses entretiens avec le Roi, avec le prince de Metternich et avec moi. Il insiste sur le danger de faire signer le jeune prince qui deviendrait ainsi responsable de toutes les fautes que l’on commettrait en son nom.

— Mais il est nécessaire de faire quelque chose, s’écrie M. de Saint-Priest. Le Dauphin pourrait revenir sur son abdication ; les droits du Duc de Bordeaux doivent donc s’affirmer nettement.

— Metternich, répond M. de la Ferronnays, m’a dit que l’Autriche, la Russie et la Prusse ne reconnaissent d’autres droits que ceux d’Henri V, que lui-même avait envoyé M. de Montbel à Prague pour convenir d’une déclaration d’Henri V à sa majorité.

— Je l’ai lue au Dauphin, leur déclarai-je, et il l’a approuvée.

— Le Dauphin, avoua M. de Saint-Priest, m’écrivit à moi-même qu’il avait renoncé à tout, mais, si son action devenait nécessaire pour son neveu, il était prêt à tout tenter.

Saint-Priest s’éleva de nouveau contre M. de Mesnard. La veille, il m’avait dit que ni lui, ni M. de Lucchesi, ni personne ne pouvait plus supporter sa présence, qu’il fallait écarter M. de Mesnard. Il sollicita mon intervention à ce sujet.

Avec M. de la Ferronnays nous convînmes de nous retrouver chez la Duchesse de Berry où je le suivrais. À midi, j’arrivai. Je trouvai effectivement La Ferronnays sortant du cabinet de Madame qui reçut un moment la princesse de Beauffremont. Pendant ce temps, La Ferronnays causait avec M. de Lucchesi, lui présentant la situation sous le même jour où je la lui avais montrée. Peu d’instants après, je fus introduit chez la Duchesse de Berry. Elle s’insurgea aussitôt contre l’idée de déposer son