de la médiocrité d’un chacun : c’est le plus irrémédiable. Un grand nombre de nos malheurs sont imputables à nous-mêmes ; notre pire malheur est de ne valoir pas grand chose. Une fatalité, notre sottise !
Quelquefois, M. Pierre Hamp arrange ses remarques d’excellent observateur en un roman. S’il demeure tout près de la réalité, comme dans ce roman de l’Enquête, où l’on sent qu’il raconte un épisode vrai, comme dans les Chercheurs d’or, où l’intérêt principal est de connaître la misère autrichienne, il a tout son talent probe et sûr, il a une incontestable maîtrise. Je n’admire pas également son Cantique des cantiques, en deux tomes. J’en aime plusieurs passages relatifs à l’industrie des parfums, à la cueillette des fleurs et au supplice des roses qui endurent la « puissance mécanicienne. » L’histoire d’amour, ou bien le roman, ne m’a point enchanté… « Elle pantelait sous la fureur de l’homme effrayé de penser qu’il était jaloux de ne pouvoir la tuer de baisers…, » etc. Du reste, M. Pierre Hamp est grand ennemi de l’amour et des femmes, qu’il déclare, dans la préface de Vieille histoire, une calamité aussi atroce que la guerre.
L’on voit, dans les musées de Hollande, quelques tableaux de Van Scorel, portraits de pèlerins qui partaient pour le dur voyage de Terre sainte, clercs, gros bourgeois, négociants, petites femmes, et chacun d’eux ayant sur son visage toute sa vie. Admirables portraits, d’une excellente justesse. Après cela, l’on cherche de plus grandes compositions de ce bon peintre : elles sont médiocres ; il n’a guère d’imagination. M. Pierre Hamp ressemble à Van Scorel : il a besoin de la réalité toute proche ; il devrait s’en apercevoir, se méfier du romanesque, où il n’est point à son affaire, et se méfier aussi des vastes doctrines, où il y a plus d’imagination que de vérité.