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à une campagne de presse esquissée en Italie et à Paris, notamment par le Messaggero, le Président du Conseil a répudié toute idée d’une entente continentale qui serait dirigée contre la Grande-Bretagne. Quant aux rapports entre la France et l’Italie, « ils sont empreints d’une cordiale amitié et le Gouvernement doit les améliorer encore. » C’est le langage du bon sens.

Mustapha Kemal pacha et Ismet pacha sont arrivés à Angora le 19 février et, depuis lors, devant la Grande Assemblée, les discours succèdent aux discours. Le 6 mars, l’Assemblée a clos la discussion et autorisé le Gouvernement à poursuivre les pourparlers de paix, dans le cadre du pacte national, sur des bases qui ne semblent pas incompatibles avec la volonté des Puissances alliées. Entre Londres, Paris et Rome, l’entente est complète ; trois points seulement seront remis en discussion : l’indemnité de guerre pour réparation à la suite de la guerre gréco-turque, certaines clauses économiques et enfin les garanties destinées à remplacer les capitulations. Les concessions consenties in extremis à Lausanne pour faciliter la signature immédiate de la paix sont considérées comme caduques. Il faut espérer que les négociations seront brèves, car, en attendant, les agents d’Angora font, dans tous les pays musulmans, une propagande de plus en plus intense, notamment en Mésopotamie et en Syrie ; on dit même qu’ils concentreraient des troupes aux abords de ces deux régions. Nous n’en avons pas fini, en Turquie pas plus que sur les frontières polono-russes ou polono-lithuaniennes, avec les complications orientales.

Nous nous reprocherions de ne pas saluer, au moment où elle disparaît, la grande figure brésilienne du sénateur Ruy Barbosa, homme d’Etat et juriste illustre, l’un des fondateurs de la République fédérative, ami éprouvé de la France. C’est lui qui, en 1914, prononça le mot fameux, qui mérite de retentir à travers l’histoire : « On n’est pas neutre entre le droit et le crime ; » c’est son influence qui décida le Brésil à entrer en guerre aux côtés des Alliés, qui ne sauraient l’oublier.


RENE PINON.


Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.