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réponse, a expliqué les motifs pour lesquels le Gouvernement britannique a décidé de maintenir ses troupes en Rhénanie : « leur présence exercera une action modératrice et pacificatrice. » Il affirme, comme M. Bonar Law, que le retrait des troupes anglaises serait la fin de l’Entente. Nous n’en voyons pas la nécessité logique ; on pourrait même imaginer un retrait amical qui aurait pour objet avéré de laisser le champ plus libre à l’expérience franco-belge. Il faut retenir particulièrement, de l’exposé de lord Curzon, cette phrase qui n’a pas manqué de produire son effet en Allemagne : « Quant à une médiation, il ne saurait en être question, à moins qu’elle ne soit demandée par l’une des parties. » Cet espoir d’une prompte médiation, qui sauverait l’Allemagne de la défaite économique et morale, c’est le dernier atout de M. Cuno ; ni le Gouvernement britannique, ni la presse ne lui laissent, à cet égard, beaucoup d’illusions. Le Times du 20 février déclare sans ambages : « Le Gouvernement allemand s’obstine et résiste aveuglément, sans doute dans l’espoir qu’un secours lui viendra du dehors. Il oublie que, dans le monde entier, règne le sentiment vif que l’Allemagne, en matière de réparations, s’est rendue coupable de mauvaise foi. Cette impression n’a pas été effacée par ce qui s’est produit dans la Ruhr. » Dans la séance du 19, aux Communes, M. Lloyd George a mené contre la politique française une attaque violente et fielleuse : il demandait au Gouvernement de faire pression sur la France pour l’obliger à évacuer la Ruhr ; M. Bonar Law, ralliant autour de lui tous les conservateurs, même le petit groupe des amis de M. Lloyd George, obtenait une imposante majorité de 305 voix contre 196. Ainsi s’effondrent les espoirs des nationalistes allemands. Ne croyait-on pas, dans certains milieux particulièrement exaltés, que l’occupation de la Ruhr ne pouvait manquer de provoquer une guerre entre l’Angleterre et la France ! La déception est rude. Le débat sur l’adresse et la négociation de M. Le Trocquer, s’ils n’ont pas complètement satisfait le public français, ont été certainement pour les Allemands une complète désillusion.

Les orateurs de l’opposition, M. Asquith, M. Ramsay Mac-Donald, lord Grey ont demandé que le conflit franco-allemand fût résolu par l’arbitrage de la Société des Nations. L’heure d’une telle intervention ne paraît pas venue. A la proposition d’une tierce Puissance, le Secrétariat général s’est borné à répondre qu’une demande de cette nature ne pouvait être recevable que si elle émanait de l’un des États intéressés. Or, l’Allemagne ne fait pas partie de la Société des Nations, et elle ne saurait y entrer qu’en acceptant les prescriptions de l’article 1er