sénégalais jusqu’au Sokoto. Dienné, Mâli, Tombouctou, Koukiya et Dendi dessinaient le Niger depuis le haut de son cours jusqu’au confluent du Sokoto, bien au-dessous de la boucle, à cinquante journées de Tamentit. Les quatre premières villes étaient autant de capitales, celles des Soninkés, des Malinkés ou Mandingues, des Touaregs et des Songhaïs. Les Songhaïs venaient de perdre une de leurs villes, Vallo, encerclée par une armée de nègres fétichistes venue du Sud. A entendre le crédule cheik de Tamentit, les chefs des deux armées, des magiciens, s’étaient changés en boucs pour se livrer ainsi bataille.
Mais le cheik redevenait précis pour parler géographie. Et sa description des pays fétichistes est si exacte, dès 1447, qu’elle concorde avec celle de Vivien de Saint-Martin consacrée au mot Soudan dans son Dictionnaire de géographie universelle en 1894.
L’informateur habituel de Malfant avait vécu quatorze ans au Soudan, dans des pays où l’or ne valait pas plus que l’argent. Et pourtant les questions répétées du Génois sur l’endroit où l’on récoltait l’or, recevaient invariablement celte réponse : « Jamais je n’ai vu quelqu’un qui pût le dire de science certaine. » Des caravanes d’Egyptiens et d’autres marchands apportaient à Tamentit l’or du Soudan, en même temps que du beurre végétal issu de l’arbre de karité, « aussi merveilleux condiment que le beurre de brebis, » pour assaisonner sans doute les sauterelles ramassées la nuit, engourdies par le froid. Dans ce marché du Touat où grouillaient les bestiaux et les chameaux, paraissaient aussi des Ethiopiens, « adorateurs de la Croix, » qui se faisaient entendre par interprètes.
L’intensité de ce trafic, le bon accueil fait à Malfant, la richesse des informations recueillies, — multa vobis narrabo, — tout semblait concourir à la création d’un comptoir génois dans le Touat. Pourtant, il n’en fut rien. Lui-même en donnait la raison : « Les gens d’ici ne veulent effectuer aucune transaction, vente ou achat, sans toucher 100 pour 100 de commission, centum pro centum de utili ad forum. Aussi ma perte, cette année, atteint-elle deux mille doubles sur les marchandises que j’ai apportées. »
« Les gens d’ici, » c’étaient les Juifs, dont Malfant disait ailleurs : « Le commerce a lieu par leur intermédiaire, et plusieurs d’entre eux sont dignes de toute confiance. » Mais cette