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CHATEAUBRIAND
ET SON MINISTRE DES FINANCES
D’APRÈS UNE CORRESPONDANCE INÉDITE

II [1]


VII. — L’AMBASSADE DE BERLIN

A peine a-t-il touché Berlin, et contemplé « cette rivière d’encre, » la Sprée. Chateaubriand n’a plus qu’un désir : tourner bride et revoir Paris. Bien des raisons motivent cette impatience, outre son caractère, qui fut toujours de dépriser après quelques jours, ou quelques minutes de possession, ce qu’il a mis des ans à obtenir : une gloire, un poste, une femme...

Mais voici, entre toutes, la raison principale. On lui a promis plusieurs « réparations » personnelles, dont le retard lui est particulièrement cuisant... Il était entendu avec ses « nobles amis » qu’en arrivant à Berlin, il trouverait le décret le réintégrant dans la dignité, et aussi dans les appointements de ministre d’État dont la décision brutale de 1816 l’avait privé. Or, les jours passent sans rien apporter ; et voilà bouleversées ses combinaisons financières, en même temps que sa tranquillité conjugale est indirectement compromise !

Ses appointements de ministre d’État, il avait donné mission à M. Le Moine de les toucher, et de pourvoir sur eux aux dépenses et aux charités de Mme de Chateaubriand ; il se doutait bien que son traitement d’ambassadeur suffirait tout juste, à Berlin, aux nécessités et aux magnificences de la fonction. Or,

  1. Voyez la Revue du 1er juin 1922.