Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 9.djvu/749

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chargée de contrôler le Gouvernement pendant les négociations.

En 1871, M. Thiers, avant d’aller traiter avec M. de Bismarck, fit élire une commission à l’Assemblée nationale et il se référa plusieurs fois à ses avis.

Eh bien ! je souhaiterais qu’une commission de ce genre, élue par nos deux Chambres, fût fixée dans la Constitution même, afin qu’elle demeurât peu nombreuse et qu’elle conservât son maximum d’autorité et de puissance.

Je ne me dissimule pas que l’idée de révision, si restreinte qu’elle soit, inquiète certains esprits. Mais, en 1884, les deux Chambres s’accordèrent au préalable sur les points qu’elles entendaient retoucher, et le président de l’Assemblée nationale ne mit en délibération que ces points-là ; rien ne fui laissé au hasard.

Je vous demande, messieurs, de réfléchir : croyez-vous que, si ces deux mesures, — le droit pour le président de communiquer avec les Chambres sans le contre-seing, et un contrôle parlementaire permanent, — avaient existé en 1919, la paix serait ce qu’elle est ?


Je me résume.

Rompre avec des pratiques diplomatiques scabreuses, qui nous ont valu beaucoup de déboires et de mécomptes ; exiger de l’Allemagne ce qu’elle nous doit et prendre, au besoin, les sanctions nécessaires ; ne supporter aucune atteinte à l’indépendance et à la souveraineté nationales ; travailler, avec les jeunes nationalités affranchies par la guerre, à la consolidation de l’Europe central ; maintenir intacts les droits et les traditions séculaires de la France en Orient ; et, pour accomplir ces grandes œuvres, faire de la présidence de la République une réalité, au lieu d’une fiction, fortifier le contrôle parlementaire, bref, empêcher le pouvoir personnel de renaître sous n’importe quelle forme : telles sont les conclusions que j’ai l’honneur de vous soumettre. Je souhaite qu’elles vous paraissent dignes d’attention, car j’y vois les moyens de faire triompher les deux causes sacrées pour lesquelles 1 500 000 Français sont morts et dix départements ont été dévastés : la sécurité et la justice.


PAUL DESCHANEL.