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ait songé à recommencer la faute que les Allemands avaient commise en 1871, l’introduction de représentants allemands dans les assemblées françaises ? Non ; mais les chefs qui avaient gagné la guerre estimaient que certaines mesures de sécurité étaient indispensables dans l’intérêt commun des Alliés ; et, là-dessus, ils étaient d’accord avec les membres du Comité qui avait été chargé de préparer le dossier des négociations, avec des hommes tels que MM. Charles Benoist, Aulard, Emile Bourgeois, le général Bourgeois, Arthur Chuquet, Ernest Denis, Gallois, Ernest Lavisse, Christian Pfister, Charles Seignobos et notre premier géographe Vidal de la Blache, — je ne puis les nommer tous. Ce n’étaient assurément point, là des impérialistes avides de conquêtes, c’étaient des hommes d’étude, de cabinet, des républicains, des professeurs qui savaient la géographie et l’histoire.

Et aussi ils se trouvaient d’accord avec les populations rhénanes qui avaient été asservies malgré elles à la domination de la Prusse et qui, en une série de manifestations retentissantes, réclameront leur autonomie dans le cadre de l’Allemagne.

Quels furent les arguments du représentant de l’Angleterre pour rejeter l’opinion des généraux, des universitaires, des Rhénans, et quels arguments le plénipotentiaire français opposa-t-il aux siens ? Nous ne le savons pas. Ce que nous savons, c’est que, le 7 février dernier, à la rentrée du Parlement britannique, le premier ministre a déclaré qu’il avait dû soustraire la rive gauche du Rhin aux tentatives annexionnistes de la France.

Ceci, messieurs, pose tout le problème des relations de la France avec l’Angleterre, ou plutôt avec le Cabinet qui gouverne actuellement l’Angleterre.

S’il est un homme qui se sente à l’aise pour en parler librement, c’est bien celui qui a l’honneur d’être en ce moment à cette tribune.

Vingt ans avant la visite célèbre du roi Edouard VII à la Chambre de commerce de Paris, il écrivait que l’entente entre la France et l’Angleterre était le fondement nécessaire de la politique européenne, que leur longue querelle à propos des colonies était, après 1870, un anachronisme funeste. J’ai toujours éprouvé pour la Grande-Bretagne, pour son génie littéraire et scientifique, pour ses institutions, pour ses hommes politiques l’admiration la plus vive. Et quant à l’homme d’Etat