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LA POLITIQUE EXTÉRIEURE
DE LA FRANCE

On se souvient que, lors de la constitution du ministère Poincaré, M. Paul Deschanel s’était proposé d’interpeller le Gouvernement sur la politique extérieure. Le texte du discours qu’il devait prononcer le 31 mars, a été retrouvé parmi ses papiers. On lira avec une respectueuse attention ces payes devenues le testament de l’homme d’Etat.


DISCOURS AU SÉNAT


Messieurs,

Je viens soumettre au Gouvernement et au Sénat quelques réflexions sur notre politique extérieure.

Et d’abord, je voudras montrer, après M. Ribot, après M. Doumergue, après M. Poincaré, l’inconvénient des pratiques diplomatiques suivies depuis 1919.

Comment a-t-on négocié dans tous les temps, sous tous les régimes, monarchie absolue, Comité de salut public. Directoire, premier Empire, monarchie constitutionnelle ? Le Gouvernement envoyait un ambassadeur auprès d’un Etat étranger. L’ambassadeur traitait avec les représentants de cet Etat ; puis il rend le compte de ses pourparlers à son chef, le ministre des Affaires étrangères. Celui-ci en référait au Gouvernement qui examinait l’affaire, et, après en avoir délibéré, adressait ses instructions à ses agents.

Cette méthode avait l’évident avantage d’offrir aux négociateurs plusieurs ligues de retraite, le temps d’étudier les questions, de mûrir leurs réponses, enfin de mettre à plus haut prix ce qu’ils concédaient.

Elle n’excluait pas des entrevues des chefs de Gouvernement ; mais ces entrevues étaient préparées à l’avance et non laissées à l’imprévu.