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les rédacteurs de ces instruments diplomatiques sont pris... un peu partout, la composition, l’ordonnance, la suite logique des idées paraissent avoir été sacrifiées à une inutile verbosité, peut-être aussi, quelquefois, à des préoccupations d’un ordre particulier, tout à fait étrangères au souci du maintien des bonnes relations entre les Etats. On ne peut, à la réflexion, se soustraire à la crainte que cet étonnant article 4 ait été rédigé uniquement pour servir de « réclame » à la Conférence, dans l’opinion américaine et l’opinion anglaise. Le texte a dû en être projeté sur quantité d’écrans lumineux et servir de « chapeau » à maints articles de journaux anglo-saxons et germano-américains [1].

Au demeurant, cette préoccupation, d’ordre démocratique et pacifiste, n’était pas la seule dans les milieux des délégations. L’article 22 du Traité sur la réduction des armements navals [2] nous montre que les « experts » navals, sinon les hommes politiques, relativement incompétents dans les questions d’ordre militaire, n’allaient pas sans se rendre compte de la précarité des engagements pris à Washington, lorsque ces engagements seraient mis en balance, en cas de nouveaux conflits, avec l’expresse nécessité, pour chaque belligérant, de ne négliger aucun moyen de se défendre.

Ceci bien compris, — et admis par tous, — mieux valait sans doute faire la part du feu et charger le traité lui-même d’autoriser toutes les violations à ses prescriptions soi-disant impératives. Voici le texte de cet article 22 : « Si l’une des Puissances contractantes se trouve engagée dans une guerre qui, dans son opinion, affecte sa sécurité nationale du côté de la mer, cette Puissance pourra, sur avis préalable donné aux autres Puissances contractantes, se dégager, pour la durée des hostilités de ses obligations résultant du présent Traité, à l’exception de celles qui sont prévues aux articles 13 et 17 [3]. »

« Toutefois, cette Puissance devra notifier aux autres Puissances

  1. Il est assez curieux de constater que la presse germano-américaine n’hésitait pas, puisqu’il s’agissait de damier la France et sa marine, à condamner hautement les méthodes de guerre navale pratiquées, de 1915 à 1918, par l’Allemagne et que l’on nous accusait de vouloir adopter.
  2. Chapitre III du traité du 6 février 1922, contenant des a dispositions diverses. »
  3. L’article 13 interdit de se servir comme navires de guerre des unités qui auront été déclassées en vertu du traité ; l’article 17 interdit de réquisitionner, en temps de guerre, les bâtiments sur chantiers pour le compte de Puissances étrangères. Ceci vise particulièrement la grande Puissance constructrice, l’Angleterre.