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convoi, habilement dirigé par Van Stabel, passa sans encombre.

Une pareille fortune ne pourrait, aujourd’hui, échoir à une forte réunion de paquebots que si elle était protégée par une véritable flotte de submersibles de croisière et d’appareils aériens, faute d’une suffisante force navale de surface.

Reste, il est vrai, la ressource de créer le type (déjà étudié a la fin de la dernière guerre) du transport sous-marin de 8 000 à 10 000 tonnes. C’est parfaitement réalisable, du seul point de vue technique. Du point de vue militaire, il y aurait à faire certaines réserves. En tout cas, il conviendrait, d’une part, de limiter la mise en jeu de navires de plongée de cette sorte aux voyages très courts d’une rive à l’autre de la Méditerranée, — et ce serait déjà fort important, — de l’autre, d’organiser, toujours au moyen des submersibles de croisière, une ligne de communications que l’adversaire serait obligé de considérer comme dangereuse pour ses propres croiseurs.

Quoi qu’il en soit de ces constatations d’ordres divers, le chiffre de 37 500 tonneaux de sous-marins fut, à juste raison, — le mal étant fait déjà et je n’y reviens pas, dans l’opinion publique américaine, — repoussé par les experts navals français qui tinrent bon pour leurs 90 000 tonnes.

Était-ce donc la victoire pour nous ? Oui et non. Une embuscade sérieuse était dressée sur notre route ; et c’était la proposition du sénateur américain Root (article 4 du Traité de Washington), ainsi conçue : « Les Puissances signataires reconnaissent qu’il est pratiquement impossible d’utiliser les sous-marins à la destruction du commerce sans violer, ainsi qu’il a été fait au cours de la guerre de 1914-1918, les principes universellement acceptés par les nations civilisées pour la protection de la vie des neutres et des non combattants, et, dans le dessein de faire universellement reconnaître comme incorporée au droit des gens l’interdiction d’employer les sous-marins à la destruction du commerce, conviennent de se considérer comme liées désormais entre elles par cette interdiction et invitent toutes les autres nations à adhérer au présent accord. »

Il est malaisé d’exprimer franchement et en termes d’une parfaite correction l’impression que doit laisser à des esprits réfléchis, — et aussi à la plupart des marins, même anglo-saxons, — la lecture de ce texte. Il est non seulement faux, mais encore absurde, en soi, de prétendre « qu’il est pratiquement impossible