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aura regardé celui de Mme L..., toute petite toile par M. Friant, et ses crayons à la ressemblance de MM. Gervex, Waltner, de Fourcaud, Majorelle ; les dessins rehaussés représentant divers portraits d’hommes, par M. Maxence, le portrait de Mme M. J... par M. Munier-Jolain, celui de M. Louis Dausset, par M. Dilly, le portrait d’homme, par M. Lavalley, les deux figures de femmes habilement peintes par M. Cayron et le portrait de M. Charles Géniaux par M. Wéry, on aura vu, à peu près, tout ce que ce Salon ajoute à la peinture.

N’y a-t-il donc rien qui le distingue des autres ? Une des vertus qu’on disait propres à la Nationale autrefois, c’était l’accueil qu’elle faisait aux arts du bois et du feu, de l’aiguille, de la navette et du touret : meuble, céramique, verrerie, fer forgé, dentelles, tapisseries, bijou. Les Artistes français, au contraire, étaient taxés de morgue hautaine à leur égard. Cette année, cette dernière dissemblance s’efface. L’absence de ces deux maîtres excellents du feu, MM. Dammouse et Lenoble, appauvrit un peu la Nationale et, par contre, le Salon des Champs-Elysées abrite sous son vélum une exposition complète de la Société des artistes décorateurs. Sous sa cloche de verre, un vaste pavillon abritant tous les arts dits « mineurs » a surgi. Il est bon de le visiter, parce qu’on y prend comme un bain de couleurs tièdes prudemment dosées et qui reposent de la peinture. Une lumière douce s’épanouissant des plafonniers en pâte de verre, ou filtrant le long des linteaux, éclaire discrètement une suite de pièces composées avec goût. Les meubles sont de corail et d’amboine, de macassar et de courbaril, les incrustations de nacre, d’ivoire et d’étain, les panneaux de laque, les appliques de bronze ciselé, les vases de grès flammé, les tentures de tissus « batikés. » O surprise ! Ces objets pourraient servir à quelque chose... Le modern-style a disparu. Il n’y a plus trace des tératologies et des déconforts de l’Exposition universelle de 1900. Les tables n’ont plus tant de pieds qu’on ne sache où mettre les siens, les fauteuils ont retrouvé des bras, les dossiers ne repoussent pas les dos, les canapés vous reçoivent un peu mieux que des bancs de cour d’assises, les commodes sont enfin commodes et l’on peut passer aux alentours d’un buffet de salle à manger sans risquer d’être éborgné par ses protubérances ornementales. Bref, l’on pourrait vivre là-dedans presque aussi confortablement que dans un meuble Louis XV ou Louis-Philippe Ier,