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distance de 100 mètres par les coureurs, on voit qu’elle correspond à une vitesse horaire de 35 kilomètres environ. On se sentirait fier d’être homme en présence de ce beau résultat, si la réflexion, cette empêcheuse de s’exulter en rond, ne nous arrêtait pour nous montrer qu’il n’y a peut-être pas là de quoi être si orgueilleux. Le bipède humain a besoin de quelques autres joyaux à sa couronne pour se croire le roi de la création. Sur les champs de course, les quadrupèdes dont l’amélioration raciale intéresse tant de gens arrivent, en effet, sur de faibles distances, à réaliser des vitesses qui correspondent à 58 ou 60 kilomètres à l’heure.

Mais ici il semble que l’homme, — incapable de s’améliorer lui- même sur ce point, — ait réellement obtenu un progrès en ce qui concerne la plus noble conquête qu’il doit à M. de Buffon. Si en effet on représente graphiquement les vitesses réalisées depuis 1855, c’est-à-dire depuis trois quarts de siècle, par les gagnants du Derby d’Epsom qui est la plus célèbre des courses de vitesse organisées, on remarque qu’en moyenne la courbe s’élève d’un mouvement lent, mais continu, qui correspond à un gain de vitesse moyenne d’environ 2 kilomètres à l’heure en un demi-siècle. C’est un résultat, — non le seul, — du jeu.

Mais en somme, qu’il s’agisse des chevaux, des hommes ou des lévriers, on est bien obligé de constater que les accroissements de vitesse de la machine animale qu’on peut obtenir à force de soins coûteux et de patience sont peu de chose et semblent acculés à des limites déjà près d’être atteintes et bientôt infranchissables. Qu’est-ce qui impose ces limites ? Il semble qu’elles proviennent d’une part de l’endurance forcément bornée de l’être vivant, d’autre part de l’impossibilité pour lui d’actionner ses membres suivant un rythme alterné dont la fréquence dépasse une certaine valeur.

Faute de mieux, l’homme a donc eu recours à des artifices, à des machines pour accroître sa vitesse, et ici, certes, les progrès ont été très nets.

Les patins permettent de réaliser une vitesse maxima d’environ 38 kilomètres à l’heure (une vitesse de tant de kilomètres à l’heure, je le répète, ne signifie pas que cette vitesse puisse être maintenue pendant une heure, mais seulement qu’extrapolée, prolongée par la pensée au delà de sa durée réelle, elle correspondrait au bout d’une heure au nombre donné). A bicyclette, l’homme a atteint la vitesse de plus de 60 kilomètres à l’heure.

Les bateaux ont réalisé des vitesses encore bien supérieures, mais qui sont elles-mêmes faibles à côté de celles des autos de course, et