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REVUE SCIENTIFIQUE

DES VITESSES RÉALISÉES DANS LA NATURE

L’affirmation sans cesse répétée et réimprimée que notre siècle est celui de la vitesse ressemble à un truisme. Cependant je me propose de montrer que, lorsqu’on y réfléchit, cette affirmation est fausse. Si nous paraissons avoir fait quelques gains dans le domaine des vitesses, c’est que nous ne sommes accoutumés de juger les choses que selon l’étalon étroit et contingent de nos petites habitudes humaines. Si au contraire nous nous élevons au-dessus de cette particularisation égoïste des phénomènes, si nous contemplons les choses non plus à notre échelle, nous devons au contraire arriver à la conclusion que notre siècle est celui de la limitation des vitesses, celui qui a domestiqué les mouvements dont on croyait naguère illimitées la liberté et l’expansion, et qui les a enchaînés dans des normes dont nos ancêtres eussent été bien étonnés.

Ouvrons le petit dictionnaire Larousse à l’article vitesse. On a dit cent fois que rien n’est aussi instructif que la lecture du dictionnaire. On peut n’être pas de cet avis, car la science des dictionnaires est souvent erronée ; du moins on conviendra que rien n’est aussi suggestif que cette lecture, car rien ne nous fait aussi bien saisir ce mélange étonnant de vérités démontrées, d’erreurs évidentes et d’hypothèses gratuites qui constitue le fond du « sens commun. »

Donc, voici ce que nous dit Larousse : « vitesse : n.f... rapport du chemin parcouru au temps employé à le parcourir. — La vitesse moyenne du cheval au trot est de 12 kilomètres à l’heure et de 40 au galop. La vitesse ordinaire d’une locomotive est de 40 kilomètres, sa plus grande de 80 ; l’oiseau dans son vol le plus rapide parcourt