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QUELQUES RÉFLEXIONS
SUR
LA RUSSIE DES SOVIETS

On ne peut plus faire un pas en politique générale sans se heurter au problème des soviets. Le mieux est donc d’y porter franchement les regards, de se remémorer les origines, les faits, les développements, d’y réfléchir, de tâcher de comprendre et d’essayer de prévoir, si possible, les suites et le dénouement.

Rappelons, d’abord, les données générales et connues : nous verrons ensuite les précisions et les spécifications.


Dès que l’industrie moderne se fut développée en Russie, il y eut des soviets [1] ; avec l’autorité que la pensée allemande a toujours exercée sur la pensée russe, ces soviets se sont, rattachés aux doctrines marxistes ou communistes. Le marxisme russe a eu, comme tous les autres, sa droite et sa gauche, ses majoritaires et ses minoritaires, ses temporisateurs et ses violents. Les violents l’ont emporté et ils ont usurpé, à leur profit, le bénéfice de la révolution.

Depuis ce temps, ils gouvernent.

Ainsi présenté, le phénomène du soviétisme paraît un cas

  1. Les circonstances dans lesquelles les Soviets interviennent dans la politique sont précisées en ces termes dans un opuscule qui vient de paraître : « ...Le 8 mars 1917, les ouvriers des usines et des fabriques de Pétrograd se mirent en grève... C’est ici que se firent pour la première fois entendre des voix insistant sur la nécessité de former un Conseil (soviet) des députés ouvriers à l’instar de celui de l’année 1905. Est-il nécessaire de rappeler de quel soviet « à l’instar de 1905, » il était question. C’était le soviet à la tête duquel s’était mis un certain Kronstaleff-Nossar. Pendant plusieurs jours, ce soviet fut maître de la ville. Il finit par menacer le comte Witte, qui se trouvait alors à la tête du Gouvernement, de l’arrêter avec tout le Conseil des ministres. » — La Révolution russe. Essai d’analyse, p. 8.