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le baron de Tardif, maréchal de camp, sont venus parmi une douzaine de hauts personnages déclarer « qu’il ont pour agréable le mariage » alors que le contrat spécifie que toute la fortune des conjoints est mobilière et stipule en tout et pour tout un préciput de deux mille francs.

Quelques-uns des comparants nous sont déjà connus pour leurs relations avec Annette : le vicomte de Montmorency, Jean-Marie Pardessus, le baron de Tardif. Le député du Loir-et-Cher, Josse de Beauvoir, est venu apporter à l’ancienne chouanne l’hommage du département où elle a lutté. Le marquis d’Avaray est comme le délégué du Roi lui-même ; n’est-ce pas son frère, le comte d’Avaray, qui, jusqu’à sa mort en 1810, avait été le fidèle compagnon, le plus cher ami de Monsieur pendant l’émigration ?

A l’exemple des nobles amis des Vallon sont venus s’inscrire les plus éminents fonctionnaires connus des Baudouin. C’est une revue des ultras de la Restauration. Cet imposant défilé d’approbateurs marque le point culminant de la carrière d’Annette. Ce fut pour elle ce que sera pour Wordsworth la fameuse séance d’Oxford en 1839 où il fut proclamé Docteur en droit parmi les acclamations. Honneur pur de tout avantage solide, avouons-le ; tout en éclat, et vite éteint.

Certains de ceux qui avaient fait cette démonstration s’avisèrent pourtant du contraste pénible qu’il y avait entre les titres d’Annette et sa fortune. Ils se joignirent à d’autres très nombreux, qui avaient été jadis obligés par elle ou témoins de ses courageux services, pour réclamer en sa faveur une récompense royale. Annette demanda que cette récompense fût attribuée non à elle-même, mais à sa fille, et c’est finalement un bureau de loterie qui fut sollicité pour Mme Baudouin. On retrouve dans cette pièce la signature du marquis d’Avaray, de Josse de Beauvoir, du baron de Tardif, de J.-M. Pardessus, auxquels une vingtaine d’autres personnages nobles sont venus ajouter leurs noms. Parmi ces derniers, nous nous contenterons de relever le marquis de Bertillat, le duc de Saint-Aignan, le comte de Salaberry. Non content de signer, J.-M. Pardessus a voulu apostiller la requête, déclarant qu’il s’agissait non de faveur, mais de justice. Quant à Salaberry, le fanatique ultra dont ses ennemis même admettaient la parfaite loyauté, lui qui avait lutté jadis pour le Roi avec Annette dans le Loir-et-Cher, il laissait percer son indignation de voir que rien n’avait été fait pour elle : « Je