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ne pouvaient consentir à ce changement. L’aide offerte par Wordsworth pour l’éducation de son enfant prit donc une autre forme que nous ne pouvons connaître. Fut-elle immédiate et dans ce cas efficace ? Ou bien fut-ce une promesse de secours annuel bientôt révoquée par les circonstances ? C’est seulement l’année suivante que le comte de Lonsdale devait verser l’argent de la dette paternelle. Wordsworth n’en avait rien perçu encore quand il vit Annette à Calais. S’il s’en tint à une promesse, qu’en advint-il ? Huit mois après leur rencontre, la guerre éclatait de nouveau, interdisant toute communication entre eux.

La seule chose certaine, c’est que Caroline demeura auprès de celle dont les circonstances l’avaient faite deux fois la fille. Elle resta française et parla la langue de France.

L’entrevue de Calais fut la crise décisive des amours de Wordsworth et d’Annette. Ils ne seraient jamais mari et femme, mais demeureraient amis jusqu’au bout. William pourrait épouser Mary, ce qu’il fit le 4 octobre. Annette retournerait à Blois avec Caroline. Les anciens amants ne devaient plus se revoir qu’une fois dans toute leur vie, dix-huit ans plus tard.


XV

Voici de nouveau Annette parmi ses amis, les Chouans de Blois, qui, avec des espoirs toujours diminués, poursuivent leurs menées contre le Premier Consul. Mais ses principaux soucis lui viennent pour un temps de son frère Paul. S’ils s’aggravent maintenant, ils remontent loin et elle a déjà pu en dire une partie à Wordsworth pendant sa rencontre avec lui..

Lorsque la sentence de mort portée contre lui en 1793 avait été cassée, Paul était revenu à Orléans reprendre sa place de clerc dans l’étude de Me Courtois. Mais il n’avait pas recouvré son équilibre. Il était alors dans l’état de beaucoup qui se dédommageaient de leurs angoisses en se donnant passionnément au plaisir. Il fit pour son malheur en 1795 la connaissance d’une certaine dame de Bonneuil qui mettait en émoi par sa beauté et son étalage de brillantes amitiés la jeunesse d’Orléans. C’était en réalité une fille Rifflon dont le père était écorcheur à Bourges. Elle avait eu d’innombrables aventures galantes, dont plusieurs avec de grands seigneurs et des personnages