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duquel le rapide 1 et le rapide 2 mettront respectivement leurs horloges à l’heure. Chacun des deux chefs de train met son horloge à l’heure en tenant compte du temps utilisé par ce signal pour lui venir de la station, et qu’il pose égal à la distance de cette station divisée par 300 000 kilomètres. Mais le chef du train 2 remarque que son collègue du train 1 a fait une erreur dans cette opération, car lui chef du train 2 observe, en croisant le train 1, que celui-ci fuit devant la lumière qui, en conséquence, lui parvient avec une vitesse inférieure et non égale à 300 000 kilomètres. Par conséquent le chef du train 2, s’il devait régler au passage l’horloge de son collègue, lui ferait subir une correction, dont celui-ci n’a pas tenu compte. Ceci suffit à montrer que l’horloge du rapide 1 ne saurait telle quelle donner des indications comparables aux précédentes, lorsqu’il effectue son voyage de retour. C. Q. F. D.

Mais ceci ne résout qu’une partie de la difficulté et laisse intacte celle qui concerne la réciprocité des indications horaires des véhicules. Sur ce dernier point, la question en dernière analyse se pose ainsi : puisque tous les mouvements sont relatifs, le résultat ne sera-t-il pas le même, que notre rapide fasse son voyage aller et retour et que la gare reste immobile, ou que l’on suppose le rapide immobile et la gare faisant de l’autre côté le trajet aller et retour ? Et alors pourquoi est-ce l’horloge de la gare qui, au moment du deuxième croisement, avance sur celle du rapide, et pas aussi bien l’inverse ?

La réponse est la suivante : Dans la Relativité Restreinte, seuls les systèmes en mouvement uniforme, au sens galiléen du mot, jouissent d’une réciprocité, au point de vue de la mesure de l’espace et du temps, mais il n’en est pas de même des systèmes en mouvement accéléré. Cela a été signalé nettement dès 1911 (à l’époque où Einstein n’avait pas encore construit la Relativité généralisée) par M. Langevin dans un mémoire remarquable sur l’Évolution de l’espace et du temps.

En Relativité restreinte tout changement de vitesse, toute accélération par rapport au milieu propagateur de la lumière a un sens absolu. C’est pourquoi dans cette première théorie on ne peut substituer à l’accélération de notre train lorsqu’il change de vitesse une accélération de la gare en sens opposé. C’est pourquoi finalement entre les indications de l’horloge de la gare et de l’horloge du rapide, il y a la dissymétrie