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Mais la confiance des officiers aviateurs n’est pas entamée. Le commandant Vuillemin vient de se poser délicatement sur le terrain d’Hussein-Bey. L’oiseau de France a traversé la Méditerranée en trois heures vingt, à une vitesse moyenne de 180 kilomètres à l’heure : c’est un oiseau de bon augure.

Le dimanche, 1er février, le général Laperrine réunit dans une conférence tous les participants du raid ; cette conférence est une causerie, où parfois la voix monte, quand le général veut inspirer à ses auditeurs l’amour qu’il professe pour le Sahara. Il explique quelles mesures ont été prises pour que le succès couronnât l’effort ; des terrains d’escale ont été aménagés, distants de trois cent cinquante kilomètres environ, et, autant que possible, à proximité d’un poste, pour que la reconnaissance puisse bénéficier des ressources du poste ; s’ils ne devaient point suffire, des terrains de secours, dans les régions difficiles, réduiront au minimum les risques d’accident à Touggourt, à Berkane, à Guettara, en avant et en arrière des gorges, et à Tesnoug. Sur tous les terrains et dans tous les postes, le service automobile a constitué des sections de dépannage ; auprès de chacune d’elles, les compagnies sahariennes ont détaché deux méharistes. Entre Alger et Ouargla le réseau télégraphique assurera les liaisons, dont le soin est assumé au delà d’Ouargla par le réseau radiotélégraphique, tous les avions étant munis de la T. S. F. Le général ajoute : « Ne vous écartez pas des pistes. » Il les décrit sommairement, étale ses cartes, appelle l’attention sur l’itinéraire In-Salah-Tamanrasset, établi par le capitaine Sollier, minutieusement étudié par l’adjudant Poivre. « Ne vous écartez pas des pistes. » Il termine, un sourire dans les yeux, la gorge un peu serrée : « Bonne chance ! »

Le lundi 2 février, le temps est couvert. On attendra au lendemain. Le 3 après-midi, de gros nuages isolés courent au-dessus d’Alger ; la montagne se dérobe, enveloppée de brume. Si l’on attend des conditions atmosphériques entièrement favorables, ne risque-t-on pas d’attendre longtemps ? Après quelques essais, l’ordre de départ est donné. « Adieu vat ! » Le premier appareil décolle à 13 heures 50. Le général Laperrine salue de la main l’avion qui emporte son chef, le général Nivelle, observateur, avec l’adjudant Bernard comme pilote ; combien il l’envie ! L’escadrille s’élève au-dessus de la mer compacte de nuages et marche à la boussole. Soudain, un appareil crève les nuées et