Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 8.djvu/966

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

huit mois de service. Le Gouvernement n’a pas voulu prendre d’engagement à date fixe, estimant qu’une telle échéance pèserait sur la politique extérieure de la France et encouragerait les résistances et les atermoiements de l’Allemagne ; il a été suivi, et c’est l’essentiel ; il a les effectifs qu’il juge indispensables ; il aura maintenant pour tâche de réorganiser les cadres et surtout de créer les spécialistes militaires indispensables à une époque où la guerre est de plus en plus industrielle, mécanique, chimique. « En ce moment, nous devons avant tout porter notre attention sur le développement de l’aviation militaire ,et sur l’augmentation de nos forces en autos blindées. » C’est Trotzki qui parlait ainsi au Congrès des Soviets.

Si, malgré les précautions prises et les engagements souscrits, la discussion s’égarait dans le domaine réservé de la politique, ou si les décisions prises sous sa responsabilité par la Commission des réparations étaient remises en question, « nous reprendrions notre liberté d’action ; » nos représentants quitteraient une Conférence qui aurait perdu de vue son objet et se méprendrait sur sa compétence. M. Poincaré a d’ailleurs donné à la Chambre l’assurance qu’aucune signature n’engagerait la France sans une décision du Gouvernement et la ratification du Parlement. Il y a tout lieu de croire que le cas extrême où nous devrions renoncer à collaborer aux travaux de Gènes ne se produira pas, car tous les États, et particulièrement les promoteurs de la Conférence, ont intérêt à ce qu’elle n’aboutisse pas à un fiasco ; or, ils savent qu’il n’y aura pas de restauration économique et financière de l’Europe sans la France. De tous côtés. Allemands, Russes bolchévistes, libéraux et travaillistes anglais, pacifistes de tous pays, révolutionnaires de toute école, affirment par avance, — peut-être en prévision de son échec, — que le succès de la Conférence dépend de l’attitude de la France. M. Tchitcherine a exprimé à plusieurs reprises cette opinion. D’un échec de la Conférence par le départ de la délégation française, les Allemands espèrent, — lisez les récents discours de M. Wirth et de M. Rathenau, — faire sortir la dislocation de l’alliance anglo-française.

La Grande-Bretagne est convaincue que son salut est attaché à la réouverture de ses anciens marchés. Reprise du commerce, remise en marche de la machine économique européenne, c’est justement l’objet des travaux que les experts ont, grâce aux délais obtenus par M. Poincaré, eu le temps de préparer et dont, réunis à Londres, ils ont fait le programme de la Conférence. L’action de la France n’est donc pas, comme on l’a dit, négative ; elle ne