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pouvait bien le rester encore quelques mois, et qu’il était impolitique de procéder aux élections avant que les problèmes territoriaux laissés en suspens n’eussent été définitivement résolus. Pour gagner du temps, le Gouvernement hellénique avait mis en avant une réforme du système électoral ; le Saint-Synode insista pour que le patriarche fût élu selon la procédure traditionnelle. Alors le Cabinet d’Athènes convoqua lui-même à Andrinople un synode national, en vue d’étudier les modalités de la future élection. Le Patriarcat protesta contre cette réunion illicite et maintint sa décision. On envisageait dans certains milieux l’éventualité d’un schisme.

« Rien n’est moins probable, — me déclara Mgr Chrysanthos. — Il n’est même pas sérieusement question de modifier le système électoral. Toute la controverse porte sur le point de savoir si les titulaires des sièges dont dépendent les territoires que le royaume de Grèce a l’espoir d’annexer, doivent prendre part au vote et en quelle qualité. Peut-être se mêle-t-il à cela quelque rivalité personnelle entre les candidats présumés. Vous aurez entendu dire à Constantinople que le Phanar tient pour Venizélos et combat sourdement la politique du roi Constantin. Le Patriarcat, en effet, a d’abord marqué une certaine défiance à l’égard du Gouvernement qui a succédé à celui de M. Venizélos, il craignait que le programme conçu par le grand Crétois en faveur des Grecs irrédimés et défendu par lui en Europe avec tant de talent et de succès, ne fut abandonné par ses successeurs. Le jour où l’on a vu Constantin et Gounaris reprendre à leur compte la grande idée venizéliste et en poursuivre résolument l’exécution, l’hostilité et la défiance du Phanar envers Athènes n’avaient plus raison d’être, et elles ont complètement disparu. » Cette explication ne concordait pas absolument avec les renseignements que j’avais recueillis d’autre part. En réalité, la lutte était ouverte entre le Patriarcat œcuménique, qui entendait faire prévaloir ses vues, elle Gouvernement d’Athènes, qui voulait imposer son candidat et s’efforçait de renvoyer l’élection jusqu’au jour où des remaniements territoriaux, qu’il espérait conformes à ses désirs, lui auraient assuré la majorité. Constantinople tenait toujours pour Venizélos et c’était la candidature d’un archevêque venizéliste que soutenait le Phanar ; Athènes lui opposait un homme dévoué à Constantin et à ses ministres. Les transactions intervenues au mois de juin aboutirent