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valeur de la Palestine, reculaient devant l’énormité des dépenses nécessaires et l’incertitude des résultats. Un désaccord éclatait entre les Anglais de la Jewish Colonisation Association, du National Found et de l’Anglo-Palestinian Bank, et les sionistes américains que dirige M. Brandeis : ces derniers prétendant disposer librement des sommes recueillies en Amérique pour le Kerem Ayessod (Restauration Found), tandis que les Anglais en exigeaient le contrôle par l’executive de sept membres, qui siège à Londres en permanence. Enfin l’émigration juive elle-même ne trouvait guère son compte à l’organisation nouvelle. A la fin de mai 1921, le docteur Caleb, représentant officiel du sionisme en Turquie, déclarait que, depuis le début de l’année, on n’avait pu envoyer en Palestine que 8 ou 9 000 émigrés. « Des centaines de milliers d’autres Juifs, — ajoutait-il, — attendent avec impatience que leur tour vienne de consacrer à la mère-patrie toute l’énergie farouche dont ils sont animés. » Mais précisément ceux qui attendaient leur tour, sans le voir jamais arriver, créaient autour d’eux le mécontentement et le doute. Avant de triompher à Constantinople, le sionisme devra obtenir à Jérusalem un succès qui réponde aux espoirs qu’il a fait naître.

Les écoles constituent une des grandes forces de la nation juive en Orient. Celles de l’Alliance Israélite universelle, où le français est enseigné avec le plus grand soin et la dernière perfection, s’étaient multipliées dans tout l’ancien Empire et y avaient merveilleusement servi notre cause et répandu notre influence. En 1912, j’ai trouvé dans les écoles de l’Alliance à Mossoul 350 enfants, à Bagdad 2 400, parlant et écrivant le français ; en Palestine, l’Alliance était établie, non seulement à Jérusalem, à Jaffa et Caïffa, mais dans des villages comme Tibériade. Elle y est restée, mais nous n’y sommes pas restés avec elle ; en Palestine et en Mésopotamie, dans les écoles Israélites, l’anglais a pris à peu près la place du français.

Lorsque j’ai visité, au mois de juin dernier, la belle école de Galata, j’ai eu le plaisir de constater que notre langue, notre littérature et même notre histoire y étaient enseignées avec le même zèle, apprises avec la même ardeur qu’il y a dix ans.

De leur côté, les Askénazim et leurs protecteurs allemands ont fait quelques efforts. La Fondation Goldschmidt et le Hilfsverein entretiennent à Constantinople un certain nombre d’écoles ; le groupe connu sous le nom de Beneberit y a créé en 1915 un