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C’est à notre XVIIe siècle que remontent les deux principaux groupements de nos missionnaires français : les Lazaristes, qui ont eu saint Vincent de Paul pour fondateur, et les Missions étrangères. Ces dernières évangélisaient en 1916 315 861 Chinois, nos Lazaristes 509 208 ; nos Franciscains 10 700, nos Jésuites, près de 300 000. Des 1 400 000 catholiques que compte la Chine, les quatre cinquièmes sont des convertis de la France. Dans l’Indo-Chine, 807 700 sur 1 100 000 catholiques, en Corée, 86 405 relèvent des prêtres des Missions étrangères, qui ont réussi à s’ouvrir le Japon et à y baptiser 70 213 âmes. Dans l’Inde et à Ceylan, un million de catholiques sont tributaires de l’apostolat français ; ils sont 261 000 à Madagascar. Dans le reste de l’Afrique, les religieux de Libermann, les Pères du Saint-Esprit, les Pères blancs de l’admirable Lavigerie ont révélé le Christ et la France à 438 581 chrétiens et à 168 621 catéchumènes. Nos missions d’Océanie comptent 160 000 fidèles. Il faut renoncer à chiffrer toutes les conquêtes catholiques françaises du Levant, et quand, en 1893, Léon XIII voulut se faire représenter au Congrès eucharistique de Jérusalem, c’est un Français, le cardinal Langénieux, qu’il choisit comme légat pontifical. Ce choix était un hommage et un symbole.

L’apostolat français, comme la colonisation française, a ceci de caractéristique que, bien loin de s’imposer du dehors et de se retrancher dans un isolement dédaigneux, il associe bien vite à son effort les âmes mêmes qu’il se propose d’éclairer et de sauver. Les Missions étrangères ont recruté 1 625 625 fidèles : leurs 46 évêques sont assistés de 1 258 missionnaires et de 1 008 prêtres indigènes, de 3 278 catéchistes et de 6 537 religieuses ; 47 séminaires dispensent l’enseignement religieux à 2 311 séminaristes qui, à leur tour, iront, au péril de leur vie, porter l’Evangile à de nouvelles populations païennes ou barbares.

Car on pensa bien que pour arracher à leurs erreurs, à leur immoralité tant d’êtres humains, il ne suffit pas de verser son or, — en 1911, sur les sept millions que récoltait l’œuvre de la Propagation de la Foi, plus de trois millions venaient de chez nous, — il faut aussi verser son sang. « On calculait en 1900, écrit M. Goyau, que les trois quarts des prêtres, frères et religieuses, affectés aux missions par les diverses nationalités, étaient originaires de chez nous, et que la France pouvait revendiquer les cinq sixièmes des martyrs. » Et cela revient à