France et à l’Angleterre, et savent qu’elle doit en subir les conséquences, mais ils n’admettent pas que ce soit au bénéfice des Grecs. Les événements récents d’Egypte, ceux de l’Inde surtout, ont montré le danger auquel l’Angleterre s’est imprudemment exposée. L’irritation de l’opinion indigène aux Indes a même, ces jours derniers, remis en cause la solidité ministérielle de M. Lloyd George en provoquant la démission de M. Montagu, ministre pour l’Inde. Lord Reading, vice-roi des Indes, envoya le 7 mars à l’India Office un télégramme où étaient formulées les exigences de l’opinion indoue dans la question du Proche-Orient ; elles répondaient aux aspirations les plus intransigeantes du nationalisme turc : Smyrne et la Thrace rendus à l’Empire ottoman, aucun contrôle européen sur les Détroits ni sur le Gouvernement turc, entière indépendance du calife, etc. M. Montagu, sans consulter le Président du Conseil, communiqua à la presse le télégramme qui constituait un désaveu direct de toute la politique suivie par le Gouvernement à l’égard de la Turquie et mettait la diplomatie britannique en délicate posture. Lord Curzon, dans une lettre, marqua à son collègue son mécontentement et M. Lloyd George l’invita à donner sa démission. Il a été remplacé par un unioniste, lord Peel, qui paraît vouloir recourir à la manière forte ; l’arrestation de M. Gandhi, sa condamnation à six ans de prison, n’ont pas, tant s’en faut, calmé l’irritation des Indous. La démission de lord Montagu a compromis de nouveau la solidité du cabinet britannique. M. Lloyd George serait, dit-on, résolu à donner sa démission après la Conférence de Gênes, à moins sans doute qu’il n’en revienne avec l’auréole du succès. Telles sont les répercussions inattendues de la question d’Orient !
Le Gouvernement français, d’autre part, est averti par le langage des journaux et de certains membres de l’Assemblée d’Angora des sentiments d’aveugle intransigeance qui animent une partie des partisans de Mustapha Kémal ; de ce côté là aussi, il y a un danger que seul un accord complet, évident, entre l’Angleterre, la France et l’Italie sur des bases raisonnables et justes pour tous, peut écarter. L’accord d’Angora a été rendu nécessaire par la politique que l’Angleterre suivait à notre égard en Orient ; il n’est cependant, à aucun degré, dirigé contre les intérêts britanniques ; il apparaît aujourd’hui, malgré ses lacunes et ses imprécisions, comme l’avenue qui peut conduire les trois Puissances intéressées à une bonne paix avec la Turquie, la Turquie elle-même à l’indépendance et à la prospérité, et la Grèce enfin à la tranquillité dont elle a besoin.