Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 8.djvu/660

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle signe cette fois (c’est la seule) William Wordsworth Vallon. Il semble qu’elle entraîne à sa suite ses proches. Le 29 décembre 1796, son frère Charles-Henry qui, deux ans plus tôt, avait épousé civilement une demoiselle Charruyau, fait consacrer en secret son union par un prêtre réfractai re dans une chambre de la maison de la rue Pierre-de-Blois qui remplace l’église Saint-Solenne.

Annette et ses sœurs, mais elle plus particulièrement, sont affiliées à ces quelques familles « trop accusées » que réprouve Cheverny. Elles sont au cœur de cette chouannerie où se distinguent Pardessus jeune, Charles de Rancogne, Guyon de Montlivault, avec lesquels leurs relations sont étroites.

Guyon de Montlivault est le chef nominal de la chouannerie blésoise. Cheverny qui n’aime pas ce turbulent le traite « d’ambilieux qui n’avait la confiance de personne. » Montlivault, certes, manque de circonspection. Il livre ingénument les secrets de la chouannerie blésoise à un espion qui se fait passer près de lui pour Chouan et qui rédige un mémoire sur les conseils des Chouans, remis le 3 mars 1797 au ministre de la Police générale. « J’ai appris par lui, dit l’espion, que Blois avait une brigade de Chouans soldée, liée par le serment ordinaire, prise dans la classe des artisans et manœuvres, mais d’une moralité sûre et constatée, et uniquement destinée à l’exécution secrète des projets du Conseil. » Leur tactique est de provoquer les ex-terroristes à s’agiter, afin de défourner sur eux les soupçons du Directoire. Les Chouans s’engagent à favoriser par tous les moyens le parti catholique et royal.

Ce n’est pas simple affaire de caste, comme on voit. Le peuple fournit les gros bataillons. Une partie de la population entre allègrement en lutte avec les Jacobins, les hue, les conspue, les rosse à l’occasion. On trouve dans les rangs des conspirateurs des hommes de toute origine. Les demoiselles Vallon ouvrent leur maison à des nobles comme Montlivault et Rancogne, à des bourgeois comme Jean-Marie Pardessus, à des artisans comme l’armurier Lacaille et ses fils, pour citer seulement ceux dont les rapports de police associent les noms aux leurs. Le père de Pardessus a été incarcéré sous la Terreur, son frère cadet a été tué à Savenay en combattant sous Laroche jaquelin, Jean-Marie lui-même est l’avocat ordinaire des Chouans traduits en justice dans la région ; Charles, fils du marquis de Rancogne, malgré