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cette force se déployer sans contrôle et sans limite, quand nous savons, par tout ce que nous disent nos hommes d’Etat, nos généraux et nos diplomates, que nous avons toujours devant nous l’Allemagne de la revanche.


Sans insister sur des considérations, que la Chronique de la Quinzaine a maintes fois signalées, revenons à des faits positifs, qui seuls comptent comme éléments de preuve dans le problème russe, envisagé au point de vue économique.

M. von Braun a développé une conception allemande concernant la réorganisation de la Russie. Voici maintenant l’exposé d’un plan, suivant lequel, dans cette immense tâche, la coopération de l’Allemagne pourrait s’imposer. La force active de ce plan est M, Félix Deutsch, directeur général de la puissante Société allemande d’Electricité, l’Allgemeine Elektricität Gesellschaft, et la force occulte est Krassine, qui a été, pendant de longues années, le représentant en Russie d’une autre grande firme, la Société d’Electricité Siemens Schuckert.

Ce qui donne à ce projet sa valeur et son intérêt, c’est qu’il se présente sous les apparences d’une combinaison internationale, dont les fils seraient aussi bien à Londres et à New-York qu’à Berlin. Mais la pensée dirigeante, où sera-t-elle, si ce n’est là où sont les hommes les plus aptes à la réaliser ?

M. F. Deutsch est particulièrement qualifié pour mettre en mouvement ce vaste consortium. Comme industriel, il connaît la Russie de très longue date, et a été en contact avec tous les Gouvernements russes, quelles qu’aient été leurs tendances Avant la guerre, le chiffre des affaires traitées en Russie par son groupe était de 100 millions de marks, sans compter les autres entreprises électriques placées sous son contrôle. Comme financier, il a de puissantes attaches en Angleterre et surtout en Amérique, ainsi qu’en témoigne sa parenté avec l’un des plus grands banquiers de New-York.

M. F. Deutsch n’est plus un adversaire du bolchévisme : il l’utilise à la manière allemande. Son opinion sur l’avenir de la Russie, à laquelle on doit, dans ces conditions, attacher une particulière importance, est nettement optimiste. Il considère que le monde ne peut exister sans le grand Etat Slave et que la question russe appelle une solution immédiate. Il ne veut, en conséquence, rien avoir de commun avec les émigrés qui pensent