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LE
PÉRIL ALLEMAND EN RUSSIE

Parmi les nations qui sont conviées à l’examen du programme tracé pour la Conférence de Gênes, il n’est pas sans intérêt de constater que l’invité qui inspire le plus de méfiance est celui auquel on a réservé la première place. La Russie des Soviets doit être, en effet, la grande attraction de ces nouvelles assises internationales où l’Allemagne ne fera que doubler ce premier rôle. Ainsi le veut la logique des faits, en face de ce déséquilibre mondial, créé par la guerre, entre la production et la consommation de l’Europe nouvelle, déséquilibre dont il faut chercher la cause principale dans la transformation profonde des Empires centraux et de l’ancien Empire russe.

De Vladivostok jusqu’au Rhin, pour des raisons multiples et à des degrés divers, 300 millions d’habitants ne sont plus en état de consommer, parce qu’ils ont perdu, en tout ou partie, leur pouvoir d’achat ou leur capacité d’échange.

Dans le même temps, d’autres pays, tels les Etats-Unis, l’Angleterre ou l’Argentine, étouffent sous le poids des matières premières qui encombrent leurs marchés intérieurs, car ils ne peuvent plus compter sur un nombre suffisant de consommateurs pour acquérir et payer leurs produits. Tout se tient dans le monde économique, et le plus riche a besoin du plus pauvre pour écouler sa production. Si l’Allemand, par exemple, boit moins de café, il en achètera moins au Brésil et les Brésiliens ne pourront pas commander autant de machines à l’étranger.

Cette constatation est surtout vraie pour ce vaste continent qu’est la Russie, dont toutes les richesses naturelles sont aujourd’hui