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LETTRES
À
ARMAND ET HENRI DE PONTMARTIN
(1867-1909) [1]

Des lettres que nous publions avec l’autorisation de Mme la comtesse de Pontmartin, treize sont adressées à Armand de Pontmartin, les autres à son fils Henri. Quelques jours après la mort d’Armand de Pontmartin, le vicomte E.-M. de Vogué publiait dans le Journal des Débats, — le 4 avril 1890, — un article de souvenirs sur le critique des Samedis [2]. Nous en détachons ces lignes :

« Il avait épousé une personne du Vivarais et habitait une partie de l’année dans nos montagnes. C’était à peine vingt minutes de marche, pour l’aller trouver de l’autre côté d’un rideau de pins sur un coteau. Derrière ce rideau de pins, s’est levé pour moi le monde de l’imagination et de la poésie. Le comte Armand était le créateur et le révélateur de ce monde : il en venait tout droit avec sa silhouette fantastique ; on l’eût dit découpé dans une des gravures de Tony Johannot, celles que j’admirais sur son exemplaire des Contes d’Hoffmann, un des livres de chevet du vieux romantique... Il m’apprenait à lire les vers de ses illustres amis : ce n’était plus la chose morte qu’on lit sur le papier, mais l’écho vivant des voix divines, communiqué par ce Moïse qui descendait du Sinaï. Quand il s’éloignait après m’avoir reconduit au bout du verger, sa taille grandissait de toute la hauteur des demi-dieux qu’il personnifiait ; je voyais leurs ombres fuir sous les mûriers avec la sienne. Les ayant connus par lui, je n’ai jamais pu les séparer de sa personne... J’ai su par cœur tout ce que Pontmartin

  1. Copyright by Raymond de Vogué, 1922.
  2. Armand de Ferrar, comte de Pontmartin, publiciste, naquit à Avignon, le 16 juillet 1811 et mourut aux Angles (Gard) le 29 mars 1890.