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pas affaiblir le Gouvernement. Il en eût été pour ses frais d’éloquence, si l’Impératrice ne l’eût soutenu de toute son opiniâtre énergie. Il est sauvé.

Je le revois aujourd’hui dans son cabinet ; il a l’air placide et souriant. Je l’interroge d’abord sur les questions militaires.

— Le général Alexéïew se rend-il un compte exact de l’intérêt supérieur, prééminent, que le salut de la Roumanie représente pour notre cause commune ?

— J’ai pu me convaincre que le général Alexéïew attache une très haute importance aux opérations dans la Dobroudja. Aussi, quatre divisions russes et une division serbe ont déjà franchi le Danube ; une deuxième division serbe sera expédiée bientôt. Mais c’est le maximum de ce que Sa Majesté l’autorise à faire dans cette région. Vous savez en effet que, du côté de Kovel et de Stanislau, nous avons à lutter contre des forces énormes.

Il me confirme ce que mes officiers m’ont appris d’autre part, à savoir que les armées russes de Galicie ont subi, ces derniers temps, des pertes excessives, sans résultat appréciable. De Pinsk aux Carpathes, elles ont à combattre 29 divisions allemandes, 40 austro-hongroises et deux turques ; leur tâche est rendue extrêmement pénible par l’insuffisance de leurs ressources en artillerie lourde et en avions. Puis, nous parlons de la crise ministérielle qui vient d’éclater à Athènes et du mouvement nationaliste qui s’organise autour de Venizélos.

— Je n’ai pas encore eu le temps, me dit Sturmer, de lire tous les télégrammes arrivés cette nuit ; mais je peux, dès maintenant, vous confier que l’Empereur s’est exprimé en termes très sévères sur le roi Constantin.



Jeudi, 28 septembre.

Coup de théâtre en Grèce. — Venizélos et l’amiral Coundouriotis se sont embarqués clandestinement pour la Crète, dont les insurgés se sont déclarés en faveur de l’Entente. Des manifestations nationalistes parcourent les rues d’Athènes. En même temps, des milliers d’officiers et de soldats se concentrent au Pirée, exigeant qu’on les transporte à Salonique, afin de s’engager dans l’armée du général Sarrail.

J’examine avec Sturmer les suites possibles de ces événements :