Par un jour d’hiver tout froid, tout bleu, mais sous un soleil vif qui fait croire au printemps proche, qu’elle est belle, la forêt nue !
Rien, rien, rien, pour la parer que la sincérité de son dépouillement, que l’intégrité des formes des arbres, et des branches brunes, tendues vers le miracle qui viendra, dans une attente paisible et sainte ; rien que votre résignation pleine de foi, troncs bruns qui ressemblez de loin à des moines velus de bure, debout, en immobile oraison, arbres au froc d’écorce, aux sandales de feuilles mortes ; arbres au cœur desquels sommeille la ferveur estivale, j’ai pensé en vous regardant, vous, tout nus flagellés par le vent de janvier, à cette âpre extase, l’extase de n’avoir plus rien, que saint François a nommée la joie parfaite.
Partageons-la, cette joie dénuée et divine ; laissons notre esprit, vide comme ce ciel, goûter cette sorte de néant, pareil à l’allégresse, pendant que le corps soumis se contracte, abolit ses sens, accepte l’hiver.
Aucun bruit. Aucune voix, ô délice ! Rien que le silence et ses arômes, une tranquillité si douce au cœur transi et l’espoir confiant des grandes métamorphoses.
Ames des plus chers humains, si, par la vertu singulière d’un pur hiver intérieur, vous vous dévoiliez ainsi comme cette forêt, que seriez-vous, sans vos feuillages ?
A l’orée, avant que les prés et les labours et la route ne recommencent, il y a une plantation de jeunes bouleaux, de ravissants bouleaux d’argent, tout blancs, tout brillants et tout intimidés.