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incontestables de la politique. Et, à l’appui de ces préjugés, ils exploitent contre moi ce qu’il y a forcément d’incomplet, ou quelquefois d’imprécis, dans l’exposé oratoire et non rigoureusement scientifique d’une théorie.

En vérité, cela semble à peine croyable ! ... Je lance un appel à la concorde, je propose à tous les Africains un terrain d’entente, un lieu de rencontre, qui est l’antique Forum de leurs ancêtres, je les engage à s’associer avec nous dans le culte de nos traditions communes. Et il y a des Français, qui considèrent comme dangereuse cette tentative de rapprochement. Passe encore pour des indigènes. Mais que les nôtres repoussent leur héritage, renient l’œuvre de leurs pères en civilisation, refusent d’en tirer, pour le bien de tous, les plus évidents avantages, — et cela sans raison sérieuse, par unique peur d’être accusés de propagande confessionnelle sous le voile de l’archéologie et de l’union sacrée, — voilà qui dénote une étrange timidité d’esprit ! ...

Peut-être, après tout, est-ce ma faute ! Peut-être, trop confiant dans la bonne volonté de tous mes lecteurs, ai-je négligé des idées et des faits que je croyais suffisamment connus, ou ne me suis-je pas assez appliqué à dissiper toute équivoque. Il me faut donc revenir encore une fois sur un sujet déjà traité bien souvent par moi, pour préciser davantage ma terminologie, mettre au point mes affirmations et, au besoin, les compléter.


D’abord, — avant même d’avoir saisi ma pensée, sur le simple vu d’un titre, — il y a des personnes qui se hérissent, qui froncent le sourcil et ne veulent plus rien entendre... « Eh quoi ? Discours à la nation africaine ? [1]... Mais alors, vous admettez que l’Afrique du Nord est une nation ? ... » Et les voilà qui agitent l’épouvantait du séparatisme !

Ai-je besoin de protester que je n’ai jamais entendu prêcher ni encourager la séparation de l’Afrique et de la Métropole ? — Il se pourrait néanmoins que telle fut la conséquence involontaire de propos imprudents. — Mais non, j’ai bien réfléchi avant d’écrire ces mots : « Nation africaine » .

  1. Voir la Revue du 1er décembre 1921.