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choisir en conséquence ses unités de mesure. De là ces unités, pouce, pied, coudée, brasse, toise que tous les peuples ont employées à l’origine et que les Anglais et les Américains utilisent encore.

Mais comme la coudée ou le pouce varient d’un individu à l’autre, on a rapidement été forcé, pour assurer la sécurité des transactions commerciales, de fixer au moyen d’étalons officiels la grandeur des unités fondamentales, et d’arrondir les rapports des unités entre elles. C’est ainsi qu’en Angleterre comme en France on décréta anciennement que le pied contiendrait douze pouces. L’ancien pied français équivaut d’ailleurs à 324 de nos millimètres, tandis que le pied anglais égale 304 millimètres. Les archéologues de l’avenir en déduiront peut-être que les sportives compatriotes de M. Lloyd George avaient en moyenne les pieds plus petits que les Parisiennes. Sied-il de les détromper ?

Pour peser les marchandises, on créa de même une unité conventionnelle, la livre (du latin libra, balance), avec des subdivisions arbitrairement adoptées.

D’autre part, — pour ne parler que de la France, — à côté de la toise carrée ou du pied carré comme unités de superficie, on employait chez nous la perche (carré de 18 pieds de côté pour la perche de Paris ou de 92 pieds pour celle de l’administration des Eaux et Forêts). Pareillement, à côté du pied cube et de la toise cube on employait pour mesurer les capacités le boisseau valant 0,38 pied cube et le setier valant 12 boisseaux. On pourrait multiplier ces exemples de la complication des anciennes mesures variables par ailleurs d’une province à l’autre, et qui, comme M. Bigourdan l’a lumineusement montré dans son beau livre sur Le système métrique des poids et mesures [1], rendait par exemple très difficile le transport des blés. Ainsi, pour exprimer en livres, un poids donné en grain, il fallait diviser ce dernier par 9 216.

Le système métrique institué par la Convention nationale en 1795 est né de la nécessité de supprimer ces incohérences, ces difficultés signalées presque unanimement dans les cahiers des États généraux. C’est ainsi que la plupart des unités des diverses catégories dérivèrent du mètre, défini comme étant la dix-millionième partie du quart du méridien terrestre, du kilogramme (masse du décimètre cube d’eau au maximum de densité et de la seconde, et que les unités secondaires devinrent des multiples et sous-multiples décimaux des unités principales. Admirable monument de la simplicité synthétique et de la clarté françaises !

  1. Gauthier-Villars, éditeur.