La Roumanie prendrait ainsi place dans la coalition au moment psychologique et assurerait légitimement, aux yeux de tous, la large satisfaction de ses aspirations nationales... L’heure présente est solennelle. Les Puissances occidentales n’ont cessé de faire confiance à M. Bratiano et au peuple roumain. Si la Roumanie ne saisit pas l’occasion présente, elle ne retrouvera plus la possibilité de devenir un grand peuple par la réunion de tous ses enfants.
Sazonow, à qui je communique ces instructions, me dit :
— Voilà qui est parfait ! Le général Alexéïew n’en sera pas moins heureux que moi.
Mardi, 11 juillet.
La grande offensive de la Somme tourne à la lutte d’usure. Après une pénible progression de deux ou trois kilomètres les assaillants sont, encore une fois, obligés de s’arrêter devant la puissance formidable des retranchements en profondeur.
La guerre de position, avec ses fastidieuses lenteurs, va donc recommencer. Au point de vue de la Russie, cette perspective est grave ; car l’opinion russe n’est déjà que trop encline à croire que l’Allemagne est désormais invincible.
Mercredi, 12 juillet.
Tous les ministres, y compris Sazonow, sont partis hier matin pour le Grand-Quartier général, où l’Empereur les a convoqués, afin de résoudre la question de l’autonomie polonaise.
L’offensive franco-anglaise sur la Somme est déjà terminée. Les résultats sont médiocres. On a avancé de deux à quatre kilomètres sur un front de vingt ; on a fait 10 000 prisonniers.
Jeudi, 13 juillet.
En l’absence de Sazonow, nous allons ce matin, Buchanan et moi, conférer avec l’adjoint du ministre, le discret, prudent et avisé Nératow.
Nous parlons de la Roumanie, quand brusquement la porte s’ouvre. Sazonow entre, dans sa tenue de voyage. Malgré la fatigue de vingt-quatre heures passées en chemin de fer, il a la mine fraîche, les yeux vifs. Il nous demande en riant :