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Benoît XV certainement en avait le sentiment ; et sans beaucoup d’effort il pouvait observer, dans certaines chancelleries d’Europe, les mêmes hostilités confessionnelles à l’endroit de la Pologne que jadis à l’endroit de l’Autriche. C’est un fait remarquable que, dans sa lettre de 1918 à l’archevêque de Varsovie, par laquelle il fêtait la Pologne ressuscitée, il la prémunissait discrètement, en trois lignes, contre le renouvellement des erreurs qui avaient coûté si cher à l’Autriche. La Pologne renaissante trouva vraiment en Benoit XV un admirable conseiller ; elle sera d’autant plus aimée, et dès lors d’autant plus puissante, qu’elle collaborera plus activement, dans l’Europe orientale, à l’accomplissement des vœux perspicaces que le Pontife formulait en ces termes : « Nous souhaitons à toutes les autres nationalités même non catholiques, précédemment soumises à la Russie, qu’il leur soit accordé de décider elles-mêmes de leur propre sort, de se développer et de prospérer selon leur génie propre et leurs ressources particulières. » L’Autriche a périclité faute d’avoir compris certaines vérités politiques qui, de quelque phraséologie compromettante que parfois elles s’entourassent, étaient, en leur essence, des axiomes de vieux droit chrétien ; la Pologne n’oubliera pas que le programme pontifical qui commenta sa renaissance, et qui l’orienta, mettait en honneur ces vérités politiques.

A plusieurs reprises, dans ses discours de consistoire, Benoît XV insista sur la nécessité de l’effort missionnaire. La force nouvelle que trouvera l’Irlande dans une pleine maîtrise de ses destinées rendra à la race irlandaise, l’une des plus grandes races missionnaires que l’Eglise ait connues, toutes ses fraîcheurs d’énergie, toutes ses allégresses d’essor. L’âme irlandaise, que de longs siècles de persécution firent s’éprendre du martyre, n’hésitera pas à l’affronter sous d’autres latitudes, pour le Christ et pour Rome. Un admirable outil de propagande, qui pendant des siècles fut à demi séquestré, est désormais à la disposition du Saint-Siège. Il y a des inspirations irlandaises, n’en doutons pas, dans ces manifestations, exigeantes et dévouées, qu’inaugure l’épiscopat des Etats-Unis, et qui semblent réclamer, pour l’impérialisme américain, un poste de labeur et d’honneur au service de l’Eglise catholique. Lorsque les catholiques d’outre-mer aspirent à jouer à côté de la France, en une juxtaposition qui n’a rien d’une subordination, un rôle actif, autonome, dans