Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/784

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rome, qui sait la vitalité catholique de ces jeunes nations, a érigé en nonciatures les internonciatures de Colombie, du Chili, d’Argentine et Uruguay, du Pérou, du Venezuela. Inversement le Venezuela, qui pendant quelque temps ne s’était pas fait représenter auprès du Pape, a retrouvé en 1919 le chemin de Rome, et le Brésil a pris l’initiative d’élever au rang d’ambassade sa légation près le Saint-Siège. On enregistra volontiers, au Vatican, les paroles du député Annibale Toledo, rapporteur du projet de loi qui proposait cette transformation.


Dans la séparation des deux pouvoirs spirituel et temporel telle qu’elle existe dans notre régime politique, expliquait ce député, aucune relation de dépendance n’existe entre eux, c’est exact. Il n’en est pas moins certain que, si notre pays a atteint un degré de civilisation à nul autre inférieur, le fait est dû en grande partie à la salutaire influence du catholicisme sur notre peuple. A mesure que l’activité humaine se déploie sous ses diverses modalités, soit à l’ombre bienfaisante de la paix, soit dans le triste cortège de la guerre, l’âme de l’homme s’imprègne davantage du sentiment religieux et conçoit, par suite, un respect toujours plus profond pour le Souverain Pontife, à qui l’humanité, aux jours d’angoisse du récent conflit européen, fut redevable des services les plus signalés.


On enregistra plus volontiers encore les propos que tint au Pape, en lui remettant ses lettres d’ambassadeur, M. Magalhaes Lima : il semblait qu’au nom même de la République brésilienne, il apportât un acte de foi, lorsqu’il déclarait que la guerre était issue des longues traditions ourdies contre l’idéal chrétien, qui depuis deux mille ans nous a façonnés [1]. Lorsqu’on songe aux courants positivistes qui, plusieurs générations durant, formèrent la pensée brésilienne, il semble que ces évolutions intellectuelles de la grande République d’outre-mer apportent au livre de Ferdinand Brunetière : Sur les chemins de la croyance : du positivisme au catholicisme, un surcroît de confirmation. Le Chili, le Pérou, ont suivi l’exemple du Brésil : leurs légations sont devenues ambassades.

Aux côtés de ces États dont la présence auprès du Pape n’avait jamais subi d’interruption, on vit survenir ou revenir, d’année en année, d’autres diplomates expédiés par d’autres nations. Il y a maintenant, auprès du Pape, un ministre de

  1. Documentation catholique, 1er mars et 31 mai 1919, p. 103 et 546.