Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 7.djvu/702

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
690
REVUE DES DEUX MONDES.

nonciation du germanique ancien. Par là, il a contribué d’une manière décisive à établir que la prononciation évolue suivant des règles fixes et constantes et à bannir le caprice de l’histoire des langues en général, de l’étymologie en particulier.

Le travail de M.  Vilhelm Thomsen est d’un caractère plus historique encore, et plus proche de la réalité positive. Il n’a pas seulement apporté des faits nouveaux à la linguistique, il lui a donné une orientation nouvelle dont les travaux les plus récents montrent de plus en plus l’excellence.

À côté des langues indo-européennes, il se parle, dans l’Est de l’Europe, des langues d’un autre groupe qui est représenté aussi par quelques parlers sibériens. Les deux langues de ce groupe qui ont fait la plus grande fortune sont le magyar, d’une part, le finnois de Finlande, de l’autre. Mais il y en a toute une série d’autres, notamment le lappon à l’extrémité septentrionale de l’Europe et divers parlers qui subsistent en Russie dans l’Oural et dans le bassin du Volga. C’est le groupe connu sous le nom de finno-ougrien.

Au lieu de borner son attention au groupe indo-européen seul ou au groupe finno-ougrien seul, M.  V. Thomsen a étudié les rapports que les deux groupes ont entretenus au cours de leur histoire. Les groupes sociaux les moins civilisés « empruntent, » comme disent les linguistes, beaucoup de mots aux groupes de civilisation plus avancée : les Romains ont beaucoup reçu des Grecs, les Germains des Romains, et ainsi toujours. Les populations de langue finno-ougrienne, dont un habitat peu favorable a longtemps retardé le développement, n’ont cessé de recevoir des mots de leurs voisins de langue indo-européenne. Le magyar, par exemple, est plein de mots slaves. Durant une période beaucoup plus ancienne, en un temps où l’ensemble du finno-ougrien formait encore une unité, le groupe tout entier a emprunté des mots à un parler de type indien ou iranien : le nom de nombre « cent, » en finno-ougrien est indo-iranien. M.  V. Thomsen a décrit en 1869 les emprunts du finnois au germanique, et en 1890 les emprunts du finnois au groupe que l’on appelle baltique, celui auquel appartiennent le lithuanien et le letton parlés aujourd’hui encore.

La portée de ces travaux a été grande. La maîtrise de