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et l’Introduction à l’histoire du Tiers-État avance à grands pas. Dès le mois de mars 1846, il est en mesure d’en adresser à l’Institut un second fragment : Les États généraux de 1484 : le Tiers-État sous Louis XII, François Ier et Henri II, et c’est par scrupule de reconnaissance et d’amitié envers la princesse, qu’il attendra son retour, pour fixer la date de la lecture en séance publique des Cinq académies [1], et ajournera la publication du morceau dans la Revue [2].

Il continue d’entretenir avec Locate une correspondance suivie. Obéissant aux suggestions de son entourage italien, Mme de Belgiojoso est conquise à l’idée de substituer une revue à la Gazetta qui périclite. Ce sera la Rivista italiana, destinée à n’avoir elle-même qu’une existence éphémère, et qui subira bientôt une complète métamorphose, pour ressusciter, sous le titre classique d’Ausonio, avec Manzoni et Massimo d’Azeglio pour coryphées littéraires.

L’entreprise exige des capitaux et la trop imprudente princesse a eu le tort de remettre les siens avec ceux de ses amis entre les mains d’un certain Falconi qui les utilise pour acquitter ses dettes personnelles. Augustin Thierry lui signale les agissements du personnage : mais Falconi, en sa qualité d’Italien, a toute la confiance de sa dupe. Bien loin de remercier le donneur d’alarme, celle-ci se répand en reprochas, l’accusant d’accueillir sans contrôle d’absurdes calomnies. Il faut, pour la convaincre enfin, le déficit bientôt constaté dans la caisse de la revue italienne, les réclamations des fournisseurs et les avertissements réitérés d’une sorte de factotum, auquel elle a remis à Paris la gestion de ses intérêts.

Le nom de ce dernier revient fréquemment et sans bienveillance aucune sous la plume irritée de l’historien du Tiers-Etat. Il s’appelle Victor Mercier, de son état présent surnuméraire au ministère de l’instruction publique. Avant de se muer ainsi, en subordonné de M. de Salvandy, il a exercé différents métiers, successivement maître-maçon, architecte et serrurier. Admirateur fervent de la princesse, il lui avoué une « amitié de caniche » et lui rend avec bonheur les services les plus désintéressés. Avant son départ pour Locale, elle a donc fait appel à son dévouement, l’a chargé de surveiller les travaux

  1. 2 mai 1846.
  2. Numéros des 15 mai et 1er juin 1846.