membres de la Société s’engageraient, non seulement à respecter, mais à maintenir contre toute agression extérieure l’intégrité territoriale et l’indépendance politique présente de chacun d’eux ; et en cas d’agression, de menace et de danger d’agression, le conseil de la Société devait aviser aux moyens d’assurer l’exécution de cette obligation. Aujourd’hui, rien de pareil ; des mots, du vent, et c’est tout. Les nations honnêtes seront seules liées par le texte et, parmi elles, la France aura même à redouter que, si la résistance opposée par l’Allemagne à l’exécution du Traité de Versailles nous oblige, un jour, à prendre des gages ou simplement à prolonger notre occupation, des signataires mal intentionnés de la déclaration commune ne qualifient perfidement d’agression les mesures indispensables à la sauvegarde de nos droits.
Toutes ces conditions, exprimées en phrases quelque peu sibyllines, la Russie soviétique sera invitée à les accepter et, si elle y souscrit, elle obtiendra, en retour, la reconnaissance officielle. C’est ce que dit, sans le dire, la fin de la déclaration : « Si le Gouvernement russe réclamait la reconnaissance officielle, les Puissances alliées ne pourraient accorder cette reconnaissance que si le Gouvernement russe acceptait les stipulations qui précèdent. » On ne précise donc pas que, si les conditions sont acceptées, la reconnaissance sera de droit ; on n’indique pas davantage si chacune des Puissances conservera sa liberté d’appréciation ou si elle sera liée par l’avis de la majorité ; on se borne à spécifier que la reconnaissance ne pourra avoir lieu qu’après acceptation ; on ne parle qu’à demi-mot, tout bas, comme dans une chambre de malade, mais on n’empêche pas les Soviets d’entendre et ils traduiront : « La reconnaissance suivra l’acceptation,» tout comme après l’ultimatum du mois de mai, l’Allemagne s’est dit : « Acceptons, pour sauver le Reich ; nous verrons ensuite. »
Rien n’est donc plus confus, plus incertain, plus indéterminé, que le programme de la future conférence et, si on ne dresse pas des barrières solides le long des précipices dont il est entouré, il risquera de nous jeter dans de redoutables aventures ; nous verrons les Puissances réunies à Gênes remettre en question les droits de la France, et anéantir les quelques morceaux du Traité de Versailles qui ne sont pas encore réduits en cendres. Déjà quoi qu’on en dise, le Conseil suprême a fait bon marché de ce Traité dans les singulières décisions qu’il a prises à Cannes. Il a, une fois de plus, et sans aucun motif, dessaisi la Commission des Réparations. Il s’est substitué