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l’abondance. La Conférence de Cannes nous a appris que « la reprise du commerce international elle développement des ressources de tous les pays sont nécessaires pour augmenter la quantité de main- d’œuvre productive et pour alléger les souffrances endurées par les peuples européens. » Développons donc les ressources de tous les pays. Mais comment ? D’abord, par un consortium de banquiers, puis, par une réunion des premiers ministres. Ce sont là pour tous les maux, des remèdes souverains.

Je ne suis pas de ceux qui se voilent la face, lorsqu’on parle des négociations commerciales avec la Russie. J’ai hautement désapprouvé, ici même, le Gouvernement français, lorsqu’il a encouragé et soutenu la folle équipée du général Wrangel ; j’ai signalé, il y a quelques mois, les conversations échangées entre Moscou, Londres et Berlin en vue d’entreprendre des affaires communes, et j’ai demandé que la France ne se laissât pas évincer des marchés orientaux. Des États voisins de la Russie et amis de notre pays ont adressé à nos agents la même recommandation. » Faites attention, nous ont-ils dit, le moment favorable va passer et vous arriverez bons derniers. Plusieurs d’entre nous ont signé des accords économiques avec la Russie. Vous, vous restez à l’écart, vous attendez, et, pendant ce temps, tout le monde prend sa place, les Allemands, les Anglais, les Scandinaves. La France a des intérêts considérables en Russie. Si elle persiste dans son abstention, sera-t-elle plus tard assez forte pour faire révoquer les concessions qui auront pu être accordées à des étrangers sur les fabriques et sur les usines qui étaient hier la propriété des nationaux français ? « — Et lorsqu’à ces observations, nous répondions que l’Amérique, elle aussi, se gardait de tout contact avec les Soviets, nos amis reprenaient discrètement : « N’en croyez rien. Soyez sûrs, au contraire, que les envoyés de la Red Cross et du Relief sont d’excellents fourriers pour les industriels et les commerçants des États-Unis. Seuls, nous vous le répétons, vous êtes absents de Russie, et cela, au moment où vous pourriez y pénétrer avec profit. »

Mais était-il nécessaire de donner à ces tractations commerciales la consécration solennelle d’une conférence où seraient convoqués les chefs de tous les gouvernements européens et, en première ligne, ceux des gouvernements russe et allemand ? On a traité M. Wilson d’idéaliste et de rêveur. Le covenant de la Société des Nations, si défectueux qu’il fût, exprimait, du moins, quelques idées précises et en fait, malgré la regrettable défection des États-Unis, l’institution