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REVUE DRAMATIQUE


Théâtre de Paris. — La Possession, pièce en quatre actes, par M. Henry Bataille.


Rien ne ressemble plus à une pièce de M. Bataille qu’une autre pièce de M. Bataille. Même atmosphère, mêmes personnages, mêmes sentiments, pris parmi ceux dont une société aurait tort de se montrer fière. Aux années d’avant guerre, ce théâtre apporta une note de perversité qui, dans le répertoire moderne, déjà si osé, parut nouvelle. Mais tout s’use. L’aventure qui nous est contée dans la Possession, — une jeune personne résolue à entrer dans la galanterie par la porte dorée et qui risque de manquer son entrer, — n’est qu’un banal épisode de la vie parisienne. L’auteur a eu beau s’ingénier, la pièce se traîne péniblement le long de ses quatre actes, dans une incohérence morne.

Mme Cordier a fait de mauvais placements : elle est complètement ruinée, obligée de mettre en location son élégante villa de Louveciennes. Sa fille, l’aimable Jessie, qui n’a guère que vingt ans, mais chez qui l’expérience n’a pas attendu le nombre des années, regarde la situation bien en face. C’est une personne pratique, dénuée de préjugés et de toute vaine sentimentalité. Devant elle s’ouvre un avenir de vie médiocre et besogneuse : d’avance, elle en a la nausée. Or, elle est belle, et la beauté est un capital : elle entend en faire un placement moins hasardeux que ceux de madame sa mère. Cherchez et vous trouverez : un vieux libertin, le duc de Chavres, lui offre une position sérieuse. C’est la belle occasion, et l’occasion perdue ne se retrouve pas : Jessie le sait, Jessie en est convaincue, pénétrée.

Ah ! ce duc de Chavres ! Dans le monde de la galanterie, où Jessie va entrer, c’est une opinion courante qu’il n’y a plus que les vieux messieurs pour avoir les égards dus à une femme entretenue. En