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des phénomènes purement géologiques. Ces auteurs tendent à les débarrasser de ce qu’ils appellent « leurs entraves météorologiques et cosmiques, disons le mot, astrologiques [1]. »

Ainsi, dès le seuil du mystère sismologique, nous voyons les opinions diverger. Tâchons du moins de situer, parmi l’incertitude mouvante des choses controversées, quelques points bien repérés et dont tous s’accordent à reconnaître la solidité.

Étudions d’abord la répartition géographique des tremblements de terre, ce que M. Montessus de Ballore, directeur du service sismologique du Chili, à qui on doit des résultats fondamentaux dans cet domaine, appelle la géographie séismologique.

Si on porte sur la carte les foyers des multiples tremblements de terre (au nombre de plusieurs centaines de mille) dont l’histoire et les chroniques font mention, on constate immédiatement que ces foyers se répartissent presque tous en un certain nombre de régions privilégiées, si j’ose dire, à l’exclusion des autres, et cela, quelle que soit l’époque historique considérée. Ainsi se justifie l’ancienne affirmation de Pline : « Il tremblera là où il a tremblé. »

Si on considère la répartition actuelle et annuelle des tremblements de terre, le résultat est le même, soit que l’on considère leur intensité ou leur fréquence, lesquelles marchent d’ailleurs de pair.

Pour cette comparaison annuelle, on possède des éléments largement suffisants, puisque, selon les évaluations de M. Montessus de Ballore, les observatoires sismologiques enregistrent, bon an mal an, avec leurs délicats appareils, une trentaine de mille secousses sismiques (près de 90 par jour en moyenne), dont le millième seulement produit des effets destructeurs.

Or, que montre la géographie séismologique ainsi étudiée ? Elle établit nettement que les régions sismiques, les lieux d’élection privilégiés des foyers de tremblement de terre, jalonnent les arêtes de ce tétraèdre sphéroïdal que constitue le globe terrestre, c’est-à-dire suivent d’une part la ligne qui borde le continent américain, tout le long de son versant pacifique, d’autre part la ligne transversale à celle-ci, qui à travers le Nord du bassin méditerranéen, et la région transcaspienne, va rejoindre les îles de la Sonde. Bref, les régions sismiques jalonnent les grandes arêtes montagneuses du globe, ou, plus exactement, les points, où ces arêtes, dans une dénivellation rapide, vont se raccorder aux grands fonds océaniques.

  1. La Nature, 11 novembre 1922.