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des Blancs-Ruthènes, des Ruthènes de la Petite Pologne et des Juifs. Les élus de cette coalition sont loin d’avoir les mêmes affinités ; les 42 députés juifs, par exemple, représentent des intérêts économiques et des catégories sociales très différentes, selon qu’ils viennent de la Galicie, de la région de Wilno ou de l’ancien Grand-Duché de Varsovie ; beaucoup d’entre eux chercheront à conclure une entente avec les partis polonais. Les 16 députés allemands ont à sauvegarder non-seulement leur droit national, mais aussi les intérêts économiques de leurs commettants. Les députés ukrainiens (5) ou blancs-ruthènes (20) auront avantage, en face de la Russie soviétique, à pratiquer une politique de loyalisme à l’égard de l’État polonais et à s’abstenir de toute opposition systématique. La présence de ces représentants nombreux des minorités nationales est une preuve évidente de la neutralité électorale méritoire que le Gouvernement de Varsovie a tenu à honneur d’observer et de la liberté réelle avec laquelle les électeurs de toute nationalité ont pu exprimer leurs suffrages. L’indépendance de la Pologne est encore si récente et l’expérience politique de ses hommes d’État si incomplète, qu’il faudra un certain temps aux groupes politiques pour se constituer et définir leur programme ; il faut compter d’ailleurs avec l’action personnelle du Chef de l’État, maréchal Pilsudski, et avec la question délicate de sa prochaine réélection à la plus haute magistrature de la République. Les élections du 5 novembre sont, pour l’avenir de la Pologne, un indice très favorable. Par son activité économique grandissante, par la continuité de sa politique extérieure, par le libéralisme de son Gouvernement intérieur, l’État polonais apparaît en bonne voie de consolidation et de progrès.

En Italie, la situation du ministère fasciste est forte et l’ordre se rétablit peu à peu ; nous n’y reviendrions pas aujourd’hui s’il était possible de passer sous silence un discours tel que celui qu’a prononcé M. Mussolini lorsqu’il s’est présenté, le 17 novembre, devant la Chambre. Jamais Parlement n’entendit sans broncher semblables insolences ; jamais représentants du peuple ne reçurent en pleine figure pareils sarcasmes ; jamais non plus députés ne se montrèrent plus soumis et plus dociles sous la cravache du dompteur. Son pouvoir, M. Mussolini ne le tient pas du Parlement, ni du Roi dont il n’a pas prononcé le nom, mais « de 300 000 jeunes hommes bien armés, décidés à tout et prêts religieusement à obéir à tous mes ordres. » « J’ai formé un Gouvernement de coalition, non pas dans le dessein d’avoir une majorité parlementaire, dont je n’ai pas besoin, mais pour