pris quelques dispositions et sommé les révoltés de se retirer, j’envoyai contre eux ma compagnie de voltigeurs. A son approche, ils se sauvèrent par la porte de derrière qu’on n’avait pas fait garder exprès, et gagnèrent à toutes jambes la forêt. Immédiatement, le maître d’école nommé par l’administration fut installé en présence de M. Matter, inspecteur d’Académie, du sous-préfet, du juge de paix de Soultz-sous-forèt, du maire et de tous les officiers. Tous les enfants avaient été mandés et contraints de venir pour assister à cette cérémonie, qui aurait semblé ridicule dans toute autre circonstance, mais qui fut imposante et pénible en même temps, tous ces malheureux enfants se figurant qu’on allait les égorger sans pitié. Ils poussaient des cris à effrayer l’auditoire. Après des discours prononcés, des conseils donnés et des exhortations faites aux parents, les enfants furent renvoyés. La commune ayant repris sa tranquillité ordinaire, et les enfants ne manifestant plus aucune crainte, je rentrai dans ma garnison le 13, en laissant toutefois deux compagnies pour maintenir les esprits dans cette salutaire disposition.
Ces deux compagnies rentrèrent quatorze jours après, lorsque la gendarmerie eut à peu près arrêté les principaux mutins. Cette prudente expédition, qui ne fit couler que des larmes d’enfants, eut un très bon résultat en ce qu’elle apprit aux populations que le pouvoir était assez fort pour faire rentrer dans le devoir ceux qui s’en écarteraient. Depuis 1830, les communes étaient très agitées et les habitants disposés à mettre à profit l’espèce de pouvoir que la Révolution de Juillet leur avait donné. Ils dévastaient en plein jour les forêts de l’État, chassaient les gardes forestiers, menaçaient les maires et apportaient sur les marchés le produit de leur vol, sans rougir de leurs actions. Je fus souvent obligé, pendant l’hiver, d’envoyer des compagnies en garnison dans les villages, sur le versant oriental des Vosges, pour faire cesser ce scandaleux brigandage.
Depuis plusieurs jours j’étais prévenu officiellement de la prochaine arrivée du Roi en Alsace, et de mon départ pour Strasbourg pour me trouver avec tout le régiment à son entrée dans la capitale de la province et aux revues qui suivraient. Le but politique de