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REVUE DE LA GARDE NATIONALE

Cette cérémonie frappa d’admiration les personnes qui en furent témoins. On ne pouvait concevoir que, dans l’espace d’un mois, 45 000 hommes eussent pu s’habiller, s’armer, s’équiper et acquérir assez d’instruction pour exécuter passablement les différents mouvements de l’exercice et de la marche en colonne. Le Champ de Mars était presque plein de ces soldats citoyens qui, placés sur plusieurs lignes, présentaient un coup d’œil fait pour inspirer un juste orgueil.

L’arrivée du « roi des barricades, » comme l’appelaient les Parisiens, fut moins annoncée par les salves d’artillerie des Invalides que par les vivats d’enthousiasme de 300 000 personnes, placées sur les talus et les banquettes de ce vaste forum. Cette immense population, avide de voir le souverain qu’elle venait de se donner, se pressait autour de lui, prenait ses mains, et lui prodiguait toute sorte d’hommages. C’était un père au milieu de ses enfants, un citoyen couronné au milieu de ses égaux. Point de gardes, point de courtisans dorés, mais beaucoup d’officiers de tous les grades qui lui faisaient cortège. Les légions n’étant pas encore toutes réunies, il monta dans les appartements d’honneur du palais, où étaient la Reine et sa jeune famille, pour attendre que tout fût prêt. Ensuite il se rendit à pied sous une immense tente, élevée sur un haut échafaudage en face du palais de l’Ecole. Des maréchaux de France, des généraux et un nombreux état-major l’accompagnaient. Le général La Fayette, commandant général des gardes nationales de France, souffrant de la goutte, s’appuyait sur le bras du Duc d’Orléans. Après la distribution des drapeaux et la prestation du serment, le Roi monta à cheval, passa devant le front de toutes les légions, et fut se placer ensuite sous le balcon du palais de l’Ecole pour les voir passer en colonne.

Les officiers du régiment, comme hôtes de l’Ecole militaire, se trouvèrent au pied du grand escalier pour recevoir la Reine, qui arriva par la cour de la caserne, dans une simple voiture de promenade. Des députations de demoiselles lui offrirent des fleurs, après l’avoir complimentée. Elle les embrassa toutes avec beaucoup d’émotion. Douze demoiselles qui représentaient les douze arrondissements de Paris étaient toutes remarquables par leur